Retraite des fonctionnaires : le choc du papy-boom

Revue de Presse

Les départs à la retraite vont s’accélérer dans les trois fonctions publiques. Ceux qui ne seront pas remplacés vont peser sur tout le système de retraite.

Du papy-boom, on n’a encore rien vu. Dans la fonction publique, les départs à la retraite vont s’accélérer, avec l’arrivée des générations nombreuses nées après la guerre. Les réformes récentes avaient pu le faire oublier, en décalant l’âge moyen de la retraite et donc en retardant l’afflux de nouveaux pensionnés. Mais  les travaux de juin du Conseil d’orientation des retraites , mis en exergue dans les documents budgétaires qui viennent d’être publiés par le gouvernement, sont une piqûre de rappel  : le système de retraite de la fonction publique est sur une pente glissante.

Le nombre de cotisants ne suit pas

Dans la fonction publique d’Etat, le nombre de retraités de droit direct va ainsi grimper de 2 à 2,2 millions en 2035, avant de décroître. Dans les fonctions publiques hospitalière et territoriale, il faut s’attendre à un doublement de l’effectif actuel, à plus de 2 millions de pensionnés en 2045. La croissance demeurera soutenue jusqu’en 2025, à plus de 3 % par an, et se poursuivra pour se stabiliser à un niveau élevé.

En face, le nombre de cotisants ne suivra pas. En 2020, il n’y aura plus que 9 actifs pour financer la pension de 10 retraités d’Etat, et ils ne seront plus que 8 actifs en 2030-2040. Sur les deux autres versants de la fonction publique, la situation est bien plus enviable, et cela s’explique par le transfert massif de personnel de l’Etat vers les collectivités territoriales durant le quinquennat Sarkozy. Mais ce dynamisme ne durera pas, car ces fonctionnaires, eux aussi, finiront par prendre leur retraite. Le ratio passera de 17 cotisants pour 10 pensionnés en 2020 à 12 pour 10 en 2030, puis il n’y aura plus qu’un actif pour un retraité en 2040.

La conséquence de décisions politiques

Si les fonctionnaires vieillissent et coûtent plus cher qu’auparavant, c’est en partie la conséquence de décisions politiques. Le non-remplacement de départs à la retraite, avant le revirement de François Hollande, diminue le réservoir de fonctionnaires qui travaillent et cotisent, alors que le flux de départs ne tarit pas. Pour ne rien arranger, le gel du point d’indice jusqu’en 2016 a privé les caisses de retraites de cotisations qui auraient été providentielles. Avec la démographie et la croissance économique, la faible croissance de la masse salariale de la fonction publique est l’une des raisons  citées par le Conseil d’orientation des retraites pour expliquer que l’équilibre du système risque d’être repoussé de 15 ans, au-delà de 2040.

En 2020, le besoin de financement «  technique » du régime de la fonction publique d’Etat devrait ainsi s’établir à 4,1 milliards d’euros, en prenant l’hypothèse d’une croissance de 1,3 % de la contribution de l’Etat-employeur (proportionnelle à l’augmentation de la masse des traitements bruts). Soit un trou de 4,2 milliards en y ajoutant le déficit des fonctions publiques hospitalière et territoriale. 

En 2030, le besoin de financement deviendrait encore plus criant  : respectivement 10,6 et 6,8 milliards pour les deux régimes, c’est-à-dire plus de 17 milliards d’euros à deux, alors qu’ils versent 70 milliards des prestations par an en 2016. 

L’équilibre n’est pas envisagé avant la fin des années 2050, et encore, pour la seule fonction publique d’Etat. Les hospitaliers et les territoriaux, eux, verront leur besoin de financement s’alourdir jusqu’à 13 milliards en 2070.

Pas de drame, puisque les déficits techniques sont comblés, année après année, sur le budget de l’Etat. Néanmoins, le poids des pensions versées aux 5,7 millions de retraités de la fonction publique est lourd. Les seuls 2,4 millions de retraités de la fonction publique d’Etat pèsent 12,9 % du budget général. 

De plus, la dégradation du solde technique de la fonction publique nuit à l’ensemble du système de retraite, dont il représente un quart. De quoi interpeller le haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, alors qu’il va ouvrir une concertation pour rendre le système de retraite plus juste, et donc plus comparable entre les différentes catégories d’actifs.

La retraite à 63 ans pour les fonctionnaires d’Etat

En 2016, la pension brute moyenne des nouveaux retraités de la fonction publique civile d’Etat s’est élevée à 2.134 euros, et celle des hospitaliers à 1.526 euros mensuels. C’est plus que la moyenne de 1.375 euros chez les salariés du privé, notamment en raison d’un niveau de qualification plus élevé. L’âge moyen de départ à la retraite continue à grimper alors que celui des salariés du privé stagne  : il a gagné 2 mois en un an, à un peu plus de 61 ans. Mais si l’on exclut les catégories actives, qui partent à l’approche de 60 ans (Etat, collectivités) ou de 59 ans (hôpital), les fonctionnaires d’Etat partent sept mois après les salariés du privé, à 63 ans.

Source : Lesechos.fr (29 octobre 2017)