Suicides France Telecom : les derniers recours de 2 anciens cadres rejetés

Revue de Presse

La Cour de cassation a rejeté aujourd’hui les pourvois formés par deux anciens cadres poursuivis dans l’affaire des suicides à France Telecom, dernière étape avant la décision finale des juges d’instruction sur la tenue ou non d’un procès.

Dans cette affaire, vue comme le premier grand dossier judiciaire de harcèlement moral institutionnalisé, les juges d’instruction avaient bouclé leur enquête fin 2014. Le parquet de Paris avait réclamé le 22 juin 2016 un procès de l’entreprise – devenue Orange – pour ‘harcèlement moral’ ainsi que pour sept cadres, dont son ancien PDG Didier Lombard, pour ‘harcèlement moral’ ou ‘complicité’ de ce délit.

Deux anciens cadres, poursuivis pour ‘complicité’, avaient demandé la nullité de leur mise en examen car, selon eux, certaines des 39 victimes mentionnées dans le dossier ne relevaient pas ou plus de leur autorité hiérarchique ou de leur service. Cette contestation avait donné lieu à une âpre bataille juridique.

La chambre de l’instruction avait d’abord rejeté leur demande en février 2016, décision qui avait ensuite été cassée en octobre 2016. La Cour de cassation avait réaffirmé le cadre restrictif de telles poursuites : ‘Une personne ne peut être mise en examen’ pour complicité de harcèlement moral ‘qu’à l’égard d’une ou de plusieurs personnes déterminées’. Mais à nouveau saisie, la chambre de l’instruction n’a pas souscrit en novembre à cette interprétation, estimant que ces cadres restaient complices de la politique managériale reprochée au sommet de l’entreprise, même sans lien hiérarchique avec des victimes.

Aujourd’hui, la Cour de cassation a suivi ce raisonnement, sans reprendre le point de principe qu’elle avait énoncé. La plus haute juridiction judiciaire a considéré que les deux requérants, en qualité de cadres, avaient ‘facilité’ la ‘consommation’ des délits de harcèlement moral reprochés à la société, ‘à travers leur contribution active à l’efficacité’ du plan de réorganisation de l’entreprise. Peu importe que certaines des victimes ne relevaient pas ou plus de leur autorité.

‘La Cour de cassation laisse à l’appréciation du tribunal le soin de préciser le principe de caractérisation stricte du harcèlement moral’, qu’elle avait mis en avant en 2016, a estimé un avocat de la défense joint par l’AFP. Dans ses réquisitions de 2016, le parquet de Paris soulignait que ‘le harcèlement moral institutionnel ou organisationnel n’existe pas en droit’ mais il mettait néanmoins en cause une politique d’entreprise délibérée, mise en place à partir de 2007, pour ‘créer un climat anxiogène et la déstabilisation des personnels dans le but de donner envie de partir’ sans recourir aux méthodes légales.

Source : lefigaro.fr (5 juin  2018)