Comment désamorcer une rumeur au travail

Revue de Presse

Source : capital.fr (28 mars 2017)

Que serait le bureau sans son lot de potins et de rumeurs… Voici comment les neutraliser quand c’est c’est à votre tour d’être le sujet des discussions.

Difficile de connaître les rumeurs qui circulent sur votre compte. Normal : s’il est une personne à qui vos collègues ne vont pas les rapporter, c’est bien vous ! Mais soyez certain qu’elles existent. Et n’en prenez pas ombrage. L’absence de rumeurs signifierait en effet que vous n’êtes pas un sujet de conversation au sein de l’entreprise et que vous n’y avez donc à peu près aucune importance.

Comment recueillir ces savoureuses informations ? En lâchant une taupe sous la moquette : un gentil stagiaire, par exemple, ou un jeune consultant effacé, prompt à se fondre dans le décor. Personne ne se méfiera quand, infiltré par vos soins dans une réunion, il lancera la conversation sur votre personne au moment où l’on s’apprête à se séparer. Comptez sur vos collègues pour envoyer la mitraille. Et pour brosser de vous le pire des portraits : manager inéquitable, arriviste, intrigant, un peu dragueur et qui, en plus, lorgne avec insistance le poste de son N+1. Maintenant que vous savez tout, ne perdez pas de temps à vous lamenter sur la méchanceté des hommes. Il vous faut concentrer votre énergie sur un seul objectif : faire taire la déesse aux mille bouches.

Commencez par éviter le démenti. Cette habitude ridicule dont les politiciens raffolent et qui ne fait, en définitive, que dérouter des fleuves entiers vers le moulin. La plupart du temps, affirmer qu’une chose est fausse revient presque à dire qu’elle est évidente. Donc, restez à distance. Prenez la rumeur de haut, en haussant les épaules et en vous en gaussant, comme si elle tombait à des millions de kilomètres de la vérité. Mais le meilleur moyen d’étouffer une rumeur reste d’en lancer une autre, histoire d’allumer un contre-feu. Plus bruyante. Plus vivace. Ce n’est pas si difficile, il suffit qu’elle soit croustillante. Vraiment croustillante. Pas une histoire de projet qui foire ( « Victoria n’est pas compétente comme chef de projet»), ni de luttes intestines à deux sous ( « Jean-Michel ferait alliance avec Jean-Philippe pour s’emparer du portefeuille clients de Jean-Claude…»), ni même de réorganisation stratégique ( « C’est du off : il paraît que la DFFT va bientôt fusionner avec la DDFFG. Mais chut !»). Non, ce qu’il faut, c’est une bonne histoire de mœurs. Une saillie qui réveille tout le monde, avec si possible de la sueur et de la salive. A vous d’en dessiner les contours avec votre brillante imagination.

Pour la mettre sur orbite, il n’est même pas nécessaire qu’elle ait un fond de vérité. Au contraire. Les gens s’ennuient parfois à ce point en entreprise qu’ils rêvent de pouvoir s’accrocher à quelque chose d’un peu divertissant. Pour fonctionner, votre rumeur doit simplement partir de deux ou trois sources différentes. Deux petits départs de feu – une assistante qui parle beaucoup et un profil ingénieur pour donner de l’assise et de la crédibilité -, un coup de vent, et hop ! c’est parti.

Lorsqu’elle commencera à monter, votre rumeur, et qu’elle arrivera jusqu’à vous, vous apprécierez de voir combien elle a été déformée. Ouvrez de grands yeux. Dites que vous n’y croyez pas une seconde. Les rumeurs, vraiment, pfff, il ne faut pas y prêter attention… Vous êtes bien placé pour le savoir.