OCDE : les professionnels partagés sur la réglementation d’Internet

Revue de Presse

Source : lesechos.fr (7 juin 2017)

Empêcher l’apparition de monopoles surpuissants ou renforcer la protection des données sont des problématiques qui divisent les professionnels d’Internet au forum de l’OCDE.

77 %. C’est le pourcentage de votes favorables à l’adoption de mesures supplémentaires pour assurer une concurrence équitable sur Internet, dans l’assistance de l’une des tables rondes du forum de l’OCDE, ce jeudi. Intitulé « inégalités, numérisation et concurrence », le débat n’a pu que constater des opinions partagées sur le sujet de la numérisation de l’économie.

Certes, a reconnu Jacques Bughin, directeur de McKinsey Global Institute, « de grands acteurs peuvent avoir une position dominante sur un marché. Mais il est complexe de démontrer qu’ils faussent la concurrence. Nous ne savons pas la valeur des données collectées par ces grands acteurs du Net. Devons nous réguler ? J’invite à la prudence ».

Pour Roxanne Varza, directrice de Station F , en France, « il nous faut trouver un équilibre entre permettre l’innovation et fixer une régulation appropriée pour ce qui doit l’être. S’attaquer à Uber peut avoir pour impact de faire disparaître d’autres acteurs du secteur qui n’ont pas forcément le même modèle ».

Des entreprises peuvent utiliser leur puissance pour fausser l’accès aux données

Ariel Ezrachi, auteur de « Concurrence virtuelle : les promesses et les périls d’une économie menée par les algorithmes », estime, de son côté qu’en théorie, Internet conduit à un marché parfait. Sauf qu’il n’est pas aussi parfait qu’on veut bien le dire.

« Des entreprises peuvent utiliser leur puissance pour fausser l’accès aux données », dit-il. Il faut, selon lui, réfléchir au niveau politique à la manière de créer un système permettant l’innovation, la création, tout en protégeant les consommateurs.

Par ailleurs, « il existe un grand risque que les plates-formes Internet ne soient plus intéressées, un jour ou l’autre, par certaines applications qu’elles hébergent aujourd’hui et les retirent, ce qui ne peut que nuire à l’innovation, la créativité et, in fine, conduire à l’érosion de la concurrence ».

Je vois des risques à ce qu’il y ait trop de concentration des données

Alors que le gouvernement chinois a récemment ordonné que le stockage des données soit effectué sur le sol national, les intervenants se sont accordés sur le besoin de protéger les données. « Si rien n’est fait, certains opérateurs auront tendance à profiter sans vergogne de ces données personnelles », a indiqué Roxanne Varza.

Constantijn van Oranje-Nassau, à la tête de StartupDelta, un accélérateur de start-up aux Pays-Bas et conseiller de la Commission européenne sur sa stratégie numérique, s’est interrogé sur le champ d’application de cette protection. « S’agit-il de protéger les données vis-à-vis des agences de renseignement nationales, vis-à-vis des entreprises ? Je vois des risques à ce qu’il y ait trop de concentration des données ».

« Il est difficile de régler le curseur, a renchéri Ariel Ezrachi, même si des ajustements doivent intervenir ». Comme ils l’ont reconnu eux-mêmes à l’ouverture de la table ronde, le sujet pourrait occuper des heures de discussion et ne serait pas réglé pour autant. Même si l’assistance demande plus de réglementation.