Orange Bank met en scène l’ubérisation de la banque

Revue de Presse

Avec sa campagne signée Havas Paris, Orange zappe banquier et espace clientèle pour ne plus mettre face à face que le client et son smartphone. 

«  Cette campagne Orange Bank est absolument géniale ! Elle reprend tous les codes des Millennials. Il y a cooptation d’une tribu qui comprend d’instinct les services proposés, car pour eux ça va sans dire ! », s’exclame Daniel Robert, auteur, en 1973, d’un slogan – «  BNP  : pour parler franchement, votre argent m’intéresse » – qui ringardisa d’un coup la communication bancaire. Le consultant Jean-Christophe Alquier, président d’Alquier Communication, est plus circonspect  : «  C’est un mouvement stratégique brillantissime de la part de l’opérateur télécoms Orange, dit-il. Mais par rapport à la radicalité de l’enjeu, la communication manque d’aspérités. Elle a un côté ‘feel good’, sympa, ludique, mais qui n’affiche pas suffisamment la rupture qu’elle est censée incarner. »

Sitôt lancée, jeudi dernier, la campagne signée Havas Paris, accompagnant le lancement d’Orange Bank n’a pas tardé à faire le buzz. L’enjeu de ce lancement, il est vrai, le vaut bien. L’opérateur, qui démarre avec 500.000 clients provenant de Groupama Banque, rachetée en 2016, vise 2 millions de clients en dix ans. C’est dans ce contexte qu’Havas Paris a travaillé, avec l’objectif de démontrer qu’avec «  Orange Bank, ce sont des gens du mobile qui pensent la banque et non des banquiers qui se sont mis à penser mobile ». «  Nous ne voulions pas parler d’Orange Bank comme d’une énième banque digitale, venue concurrencer Boursorama, Fortuneo, BforBank », résume Valérie Planchez, vice-présidente d’Havas Paris, qui a travaillé sur la campagne avec Christophe Coffre, président-directeur de création de l’agence.

Volontairement imparfait

Dont acte. Le film corporate de 30 secondes a été tourné à la verticale, sur le mode du smartphone et de manière légèrement inclinée, pour une authenticité plus vraie que nature, façon YouTube. «  La lumière est un peu crue, les mises en scène sont celles de la vraie vie, volontairement imparfaites », explique-t-on chez Havas Paris. Tout comme le langage  : «  Attends, mec, la banque, maintenant, ça n’a plus rien à voir », explique d’emblée l’un des protagonistes.

S’ensuit une série de tranches de vie, ludiques, rythmées, se projetant dans un espace-temps heureux, où Orange Bank existerait depuis longtemps déjà, ici et maintenant… Un espace où le personnage du banquier compréhensif, empathique, brille par son absence. Tout comme le décor classique de l’agence bancaire scintille par sa non-représentation (même si l’opérateur s’appuiera sur les 144 espaces aménagés dans son réseau de boutiques). La signature de la campagne s’inscrit dans la droite ligne du positionnement marketing choisi  : «  La banque maintenant. » Enfin, quatre spots «  produits » de 12 secondes détaillent les services les plus appréciés (virement par SMS, blocage et déblocage de carte, paiement par mobile et solde en temps réel).

Ubérisation du service bancaire

Ainsi, après que le banquier a été peu à peu écarté des écrans ces dernières années, puis a retrouvé la parole (Monabanq, La Banque Postale, BNP-Paribas), voilà qu’une troisième fracture s’ouvre dans la communication du secteur  : l’ubérisation du service bancaire, dont témoignent les images fragmentées des spots de la banque d’Orange, 100 % mobile, plaçant face à face le client… et son smartphone. 

Simple commodité

«  Avec Orange Bank, la grande question qui, depuis plusieurs années, agitait la banque de détail – le service bancaire est-il une prestation à forte valeur ajoutée, que l’on doit payer très cher ou un service simplissime, à la manière d’une appli comme Uber, TripAdvisor, Airbnb ? -… se trouve résolue, reprend Jean-Christophe Alquier. Dans la majorité des cas, le service bancaire se réduit à une simple commodité. Les banquiers ont perdu le pouvoir sur le front de la relation avec le client. Même si Orange Bank et Havas Paris devront adapter leur copie lorsqu’il sera question de sujets sensibles, comme le crédit. »

Source : lesechos.fr (03 novembre 2017)