Chiche, monsieur Macron, discutons des sujets sociaux cruciaux

Revue de Presse

Les arbitrages budgétaires du gouvernement nous inquiètent…

Au moment où s’effectue la traditionnelle rentrée, scolaire mais aussi sociale, de lourdes interrogations se posent encore pour les salariés et citoyens de notre pays.

Le regain d’activité économique n’est pas au niveau attendu, entrainant une quasi-stagnation du chômage. Une large part de nos concitoyens reste enlisée dans la pauvreté et le chômage de longue durée. Leurs difficultés ne sont pas solubles dans la croissance. C’est pourquoi leur capacité à vivre dignement, à intégrer ou réintégrer le marché de l’emploi nécessite des mesures volontaristes d’ampleur, mobilisant l’ensemble des acteurs.

Au-delà, nombre de Français connaissent encore des situations difficiles et une précarité qui les fragilise. Ils constituent l’une des facettes d’un pays dont la cohésion est fracturée par le prisme de l’hétérogénéité sociale et des inégalités. C’est pourquoi les arbitrages budgétaires du gouvernement nous inquiètent. En ciblant financièrement et indistinctement les retraités, les chômeurs, les allocataires, on commet une erreur à la fois politique, en divisant un peu plus les Français entre eux, et économique car le manque d’activité n’est pas de la responsabilité des ‘inactifs’ mais de l’insuffisance d’investissement, d’innovation, de dialogue social, de formation. A nouveau, ce sont les plus précaires qui risquent d’en faire les frais.

Tous ces questionnements, tous ces mal-être, toutes ces interrogations couvent. Dans ce monde où tout bouge à grande vitesse, beaucoup, saisis du vertige de l’identité, voient dans le populisme nationaliste un refuge.

Face à ce mal français voire européen, les énormes enjeux sociaux et sociétaux auxquels nous devons faire face nous dictent une obligation de réussite.

Les organisations syndicales que nous représentons n’ont pas la prétention de détenir des solutions toutes faites. Mais, marque de leur réformisme, elles sont résolues à s’engager pour contribuer à le faire reculer, avec la force de conviction et le savoir-faire de leurs militantes et militants.

Sur ce sujet comme sur d’autres, Emmanuel Macron avait ouvert une perspective cet été avec sa formule de ‘République contractuelle’. Alors, nous avons envie de dire : ‘Chiche, Monsieur le Président!’.

Chiche pour ouvrir un vrai chantier de construction collective sur les sujets cruciaux que sont, par exemple, la lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, la transition écologique, la santé et la qualité de vie au travail, l’adaptation de notre système de protection sociale, la construction d’une Europe autant porteuse d’efficacité sociale et environnementale qu’économique! Chiche pour réunir le plus largement possible les acteurs sociaux et les pouvoirs publics autour de cet objectif!

Mais chiche aussi pour comprendre que leur association ne pourra se faire sans reconnaissance de leur autonomie de pensée et d’analyse. Chiche pour assimiler que, sans justice, il n’y a pas d’acceptation sociale et que, sans ce fil à plomb, on ne construit rien de durable.

Seul, on peut s’agiter, tracer des perspectives audacieuses ou élaborer des plans grandioses. Mais si l’on veut aboutir, c’est-à-dire réformer, c’est pour le pays et avec lui que l’on doit le faire.

Tribune de Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, Philippe Louis, Président de la CFTC et de Luc Bérille, secrétaire général de l’Unsa

Source :   huffingtonpost.fr (4 septembre 2018)