La hausse de la CSG sera-t-elle vraiment compensée pour les fonctionnaires ?

Revue de Presse

« La hausse de la CSG sera-t-elle vraiment compensée pour les fonctionnaires ?»

A la différence des salariés, qui gagneront du pouvoir d’achat avec la réforme, les fonctionnaires devraient seulement voir la hausse de la CSG compensée. Et encore, les syndicats dénoncent une compensation qui pourrait parfois n’être que partielle. Explications.

Une hausse de 1,7 point du taux normal de la CSG est donc prévue dans le cadre du budget 2018, et interviendra dès le 1er janvier pour rapporter plus de 22 milliards dans les caisses. Pour compenser cette hausse, les cotisations sociales, elles, baisseront en deux temps  : de 2,2 points au 1er janvier 2018 puis de 0,95 point en octobre 2018.

Pour l’ensemble des salariés (sauf les salaries supérieurs à 33 000 euros mensuels), la gain liés à la baisse des cotisations sera supérieur à la hausse de la CSG, comme nous l’avons déjà expliqué dans une précédente réponse. 

Mais pour les fonctionnaires (qui seront touchés par la hausse de la CSG mais ne bénéficieront pas de la suppression des cotisations « maladie» et « chômage», dont ils ne s’acquittent pas), le gouvernement a prévu de se limiter à une compensation de la hausse de la CSG. En théorie, les fonctionnaires ne devraient pas perdre d’argent… ni en gagner. 

A noter qu’il s’agit d’une rupture d’un engagement de campagne réitéré à de nombreuses reprises par Emmanuel Macron, qui avait promis dans plusieurs discours que une hausse du pouvoir d’achat des fonctionnaires. Par exemple à Caen, en mars 2017 :  

« C’est parce que le travail est essentiel qu’il doit aussi payer de manière juste et c’est donc pour cela que tous les travailleurs et toutes les travailleuses verront leur pouvoir d’achat augmenter avec notre réforme de la prime d’activité et notre réforme du financement du chômage. Tous les travailleurs, toutes les travailleuses, qu’ils soient fonctionnaires, indépendants, entrepreneurs, professions libérales, salariés, verront leur pouvoir d’achat augmenter. Cent euros au Smic, pour chaque travailleur. Cent euros par mois de plus, parce que nous financerons différemment les grands risques et parce que je ne veux plus entendre qu’il est plus intéressant de ne pas travailler que de travailler, dans notre pays.»

Y aura-t-il vraiment compensation ?

Pour compenser la hausse de la CSG qui touchera les fonctionnaires, le PLF 2018 prévoit de supprimer la contribution exceptionnelle de solidarité (CES), au taux de 1%, prélevée sur les rémunérations des agents publics et des salariés des employeurs du secteur public et parapublic.

La CES a pour objet de faire contribuer ces agents et salariés, qui ne sont pas assujettis aux cotisations salariales d’assurance chômage, à l’effort collectif de solidarité à l’égard des chômeurs.

Cette mesure n’est toutefois pas suffisante pour compenser la hausse de la CSG  : le taux de la CES (1%) est plus faible que l’augmentation prévue de la CSG (1,7 point) et les agents publics dont le traitement indiciaire est inférieur à 1 466 euros mensuels ne sont pas assujettis à la CES.

En complément, le gouvernement propose donc de créer une indemnité compensatrice différentielle pour les agents en poste au 1er janvier 2018, pour un coût global d’environ 1,6 milliard d’euros.

Cette prime annuelle serait directement versée par les employeurs publics et permettrait de compenser intégralement la hausse de la CSG pour chaque agent.

Enfin, une prime annuelle de 0,76% de leur traitement est prévue pour les agents recrutés après le 1er janvier 2018.

Toutefois, les organisations syndicales estiment qu’on ne peut pas vraiment parler de compensation intégrale, pour deux raisons. 

La première est que le montant de ces indemnités et primes annuelles sera calculé au 1er janvier 2018 sur la base des rémunérations de 2017. « En cas d’augmentation de la rémunération d’une année sur l’autre, plus fréquente qu’une baisse, l’agent sera donc pénalisé», déplore Mylène Jacquot, secrétaire générale de la CDFT fonctions publiques :   « Nous aurions préféré un calcul mensuel.» En effet, la CSG, prélevée mensuellement à la source, est directement liée à la rémunération réelle.

Même problème en 2019. Si une révalorisation de l’indemnité compensatrice est prévue en janvier 2019 en cas d’augmentation entre 2017 et 2018, ce calcul se fera sur la base des revenus de 2018.

A noter que ce système profite, à l’inverse, dans les cas de rémunérations à la baisse, qui sont nettement plus rares

Le deuxième problème, selon Mylène Jacquot, est qu’en l’état, aucune révalorisation de l’indemnité compensatrice n’est prévue après celle de 2019. Ainsi, au-delà de cette date, un agent dont la rémunération augmente continuera de payer 1,7 point de CSG supplémentaire sur une rémunération croissante… mais ne verra pas évoluer l’indemnité compensatrice (calculée sur son ancienne rémunération). La compensation serait donc dégressive dans le temps. 

Pour résumer : là où le mécanisme baisse de cotisations-hausse de la CSG prévoit un gain pérenne de pouvoir d’achat pour les salariés, il ne prévoit qu’une compensation pour les fonctionnaires, laquelle ne sera pas vraiment complète, en cas d’augmentation des rémunérations des agents.

Source : liberation.f (5 janvier 2018)