Pionnier des nouveaux médias, Benoît Raphaël s’est mis en tête de nous aider à élever des automates. Et s’insurge contre la « robophobie ». Stimulant.
Benoît Raphaël a eu différentes vies, il a créé Le Post.fr, le Plus de L’Obs, le Lab d’Europe 1, Mon Journal de Nice-Matin, ou encore la start-up Trendsboard avec son ami Jean Véronis, chercheur en traitement automatique des langues. Or, depuis plusieurs mois, le pionnier des nouveaux médias passe de plus en plus de temps avec Flint, un robot conversationnel, qui vous envoie des informations selon vos centres d’intérêt.
Ce n’est pas de tout repos. On l’a vu avec le robot conversationnel Tay, mis au point en 2016 par Microsoft et qui, alors que tout avait bien commencé, s’était laissé aller au bout de quelques heures à des propos racistes… En réalité, les intelligences artificielles sont sensibles à l’environnement dans lequel elles grandissent.
Il faut les éduquer un peu comme les enfants.
« Il faut les éduquer un peu comme les enfants , explique l’entrepreneur. C’est comme un muscle que l’on va entraîner pour le rendre plus performant. Nous fonctionnons avec la méthode test and learn pour que nos robots deviennent le plus pertinents possible », explique-t-il. Une fois élevés, ces robots peuvent être consultés en fonction de leur expertise.
Dans l’écurie de Flint, il existe ainsi une intelligence artificielle spécialisée dans la ville de demain, une autre, baptisée Yolo, éduquée à l’environnement par Anne-Sophie Novel, ou encore Ella, une agente intelligente attachée au service de la mixité qui a été élevée par Natacha Quester Séméon, cocréatrice de l’association Jamais sans elles. Le robot Gordon, spécialisé dans la finance, a, lui, grandi avec Pierre-Philippe Cormeraie, du groupe BPCE.
Un robot spécialisé dans la finance
Cette approche a convaincu le cabinet de recrutement Accenture. « Une cinquantaine de robots Flint améliorent le quotidien de nos analystes et managers Accenture Research dans une vingtaine de pays. Ils augmentent notre productivité et nous préparent de façon pratique et ludique à l’apprentissage des machines et à la collaboration nécessaire à l’évolution de notre métier’, explique ainsi Philippe Roussière, un des cadres d’Accenture Research.
Les robots vont-ils nous remplacer ?
Reste cette crainte grandissante : les robots vont-ils nous remplacer ? « Si on veut nous remplacer dans notre travail, c’est peut-être parce nous travaillons comme des robots », glisse l’entrepreneur français. Est-ce que le robot va nous détruire ? « Le robot nous fait peur, car c’est un miroir de nous-mêmes. Pour l’instant, rien ne dit scientifiquement si l’intelligence artificielle va ou non surclasser l’homme. »
Une manière de donner raison au polytechnicien et chercheur en robotique Alexandre Lebrun qui estime qu’ « en termes d’apprentissage des machines nous sommes en 1997 », c’est-à-dire l’année où tout a commencé pour l’Internet grand public. Bref, les robots seront ce que nous en ferons. Benoît Raphaël nous emmène à redescendre un peu sur terre, et comprendre que l’on peut travailler avec les intelligences artificielles. ‘Les humains vont continuer à faire des enquêtes, des recherches et mener un travail d’analyse’ a d’ailleurs expliqué Benoit Raphaël dans cette édition de #TECH24, l’émission high-tech de France 24 présentée avec Marjorie Paillon et dont Le Point.fr est partenaire. « Travailler avec les robots nous rend plus intelligent. Commençons par travailler avec eux avant d’en avoir peur », conclut le quadragénaire.
Source : lepoint.fr (7 juillet 2018)