Casablanca, nouvelle tête de pont du groupe Orange en Afrique

Revue de Presse

Source : lemonde.fr(9 janvier 2020)

L’opérateur télécoms français a inauguré dans la capitale économique du Maroc le siège de son entité dévolue au Moyen-Orient et à l’Afrique.

Ciseaux à la main, Stéphane Richard, le PDG d’Orange, vient de couper le ruban pour inaugurer le nouveau siège africain de l’opérateur télécoms, à Casablanca. Perché au 17e étage de la tour Casablanca Finance City (CFC), tout le comité exécutif du groupe est présent, ce mercredi 8 janvier. C’est depuis ces bureaux situés dans le nouveau quartier d’affaires de la capitale économique du Maroc que seront désormais pilotées les opérations Afrique et Moyen-Orient de l’opérateur français, sous la houlette du patron de la division, Alioune Ndiaye. «  La portée symbolique et politique est claire  : notre engagement est de développer Orange en Afrique », déclare Stéphane Richard.

Et pour cause  : le continent est la zone où le groupe connaît la plus forte croissance, d’environ 6 % chaque année. Avec 125 millions de clients à travers 18 pays, le chiffre d’affaires de l’entité Orange Middle East and Africa (OMEA) s’élève à 5,2 milliards d’euros. «  Il y a dix ans, l’Afrique représentait 5 % de notre chiffre d’affaires, aujourd’hui c’est 13 % », annonce le PDG, alors que le groupe fait face à un recul des ventes en France et en Espagne, ses deux principaux marchés.

Stratégique et symbolique

«  Sur les quatre grands opérateurs télécoms en Afrique, nous étions les seuls à ne pas avoir de siège sur le continent », souligne Alioune Ndiaye en référence à ses concurrents MTN, Vodafone et Bharti Airtel. Pour cette installation à la fois stratégique et symbolique, le choix de Casablanca s’est rapidement imposé. «  Nous avons accès à une qualité de vie, à des infrastructures et à des services. Casablanca est aussi un nœud de communication qui nous permet de rayonner », liste Stéphane Richard. La capitale économique est un hub aérien entre l’Europe et l’Afrique, avec une trentaine de pays africains desservis par Royal Air Maroc. A cela s’ajoutent la sécurité, un cadre institutionnel stable et les compétences sur place.

Avant de s’implanter, le groupe a tout de même dû prendre en compte certains obstacles. Abdou Diop, consultant chez Mazars à Casablanca, a accompagné Orange dans son installation. Il évoque le coût élevé de la vie au Maroc pour un expatrié subsaharien, surtout pour la scolarité ou le logement. «  Il y a eu des questions concernant l’accueil des cadres venus d’Afrique subsaharienne. Il a fallu démontrer que le Maroc était un pays accueillant », explique-t-il, le royaume ayant la réputation d’être un pays où sévit le racisme anti-Noirs.

Orange a aussi pu bénéficier des avantages offerts par CFC, la nouvelle place financière casablancaise. Les cadres expatriés venus de différents pays ont été accompagnés dans l’obtention rapide de leur carte de séjour. «  Orange a aussi bénéficié de facilités liées aux opérations de change en cas de mouvements de fonds entre OMEA et les différentes entités du groupe », détaille Abdou Diop, qui précise qu’il n’y a pas eu d’intérêts fiscaux particuliers. En retour, la ville blanche gagne en attractivité auprès des investisseurs étrangers.

Le groupe lorgne l’Ethiopie

Choisir Casablanca a enfin été une décision politique, alors qu’Orange est le deuxième opérateur du royaume. «  Au Maroc, nos partenaires ne sont pas étatiques, contrairement au Sénégal ou à la Côte d’Ivoire. S’installer à Dakar aurait pu nous être reproché par Abidjan, et vice-versa. Politiquement, cela aurait été compliqué à expliquer. Casablanca est un choix raisonnable et d’équilibre », affirme Stéphane Richard.

Le nouveau siège casablancais est un signe fort de l’accent porté sur les activités africaines. Le groupe compte développer encore ses services, croître dans les pays où il est déjà présent, mais aussi s’étendre géographiquement. Si l’opérateur est très fort en Afrique francophone, «  il y a beaucoup de pays où nous ne sommes pas », concède Stéphane Richard. Orange lorgne notamment l’Ethiopie, un marché de plus de 100 millions d’habitants qui réfléchit à libéraliser son secteur des télécoms. «  La compétition va être forte, mais on sera présent. Si on arrive à accéder à ce marché, le développement d’OMEA sera majeur », anticipe le PDG.

Le rapprochement du centre décisionnel des marchés africains s’opère aussi alors qu’OMEA devrait entrer en Bourse en 2020. «  Aucun calendrier n’est fixé, la décision se fera en fonction des conditions du marché et des perspectives de valorisation, indique Stéphane Richard. Mais nous savons que ce sera une double cotation, africaine et européenne. »