Source : rtl.fr (19 mars 2020)
Face à l’épidémie de coronavirus et aux mesures drastiques de confinement, le cadre établi par le code du travail explose, ce qui a permis des souplesses encore jamais vues.
L’épidémie de coronavirus a-t-elle fait voler en éclat notre code du travail ? La crise actuelle est un camion lancé à vive allure sur ce vieux bonhomme de 110 ans. En temps de crise, le cadre établi par le code de travail explose. C’est symbolique : même ceux qui jugent du droit sont contraints d’être en pause. ‘Nous, prud’hommes, on est hors-jeu’, entendait-on hier de la bouche d’un conseiller prud’homal. Un représentant des petites entreprises, la CPME, a même dit : ‘Provisoirement, le code du travail tel qu’on le connaît, n’a plus de sens’.
Comment en est-on arrivé là ? En quelques jours, il y a eu deux commandes contradictoires. D’abord, le fameux ‘restez chez vous’ et ensuite, pour ceux qui sont indispensables, ‘venez travailler’. Bien que légitimes, ces deux commandes ont fait voler en éclat les connaissances des salariés, comme des chefs d’entreprises, sur ce qui est autorisé, légal, risqué et puni. Les représentants du patronat ont dû se transformer en conseiller juridique, avec des milliers d’appels de chefs d’entreprises. Côté salariés, la CFDT a reçu plus de 1.000 questions en 24 heures sur sa boîte mail dédiée au coronavirus. Tout le monde avance à tâtons, y compris le ministère du Travail.
Les circonstances, pour le moins anxiogènes, créent des situations paradoxales : des salariés qui exercent leur droit de retrait sans raisons raisonnables, des chantiers qui ferment,… Dans ce flou artistique, tordre le cadre a aussi parfois permis des souplesses jamais vues, comme des salariés au télétravail qui gardent leurs enfants avec un boulot dégradé, sous l’œil bienveillant de leur manager. Pourtant, dans leur globalité, salariés comme chefs d’entreprises se retrouvent aujourd’hui en insécurité juridique, avec parfois des craintes de litiges.
Vers un aménagement du code du travail ?
En ces temps de crise, il est certain que le code du travail doit être aménagé, modifié en urgence. Est-ce qu’il faut le jeter pour autant avec l’eau du bain ? Non. Les règles du travail ont toujours bougé avec leur temps. Elle évolueront encore. L’une des mesures décidées cette semaine permet par exemple au boulangeries de vendre du pain 7 jours sur 7. Le texte qui permet cette autorisation n’a en fait rien de nouveau : c’est un morceau du code du travail qui était en vigueur durant l’entre-deux-guerres.
Mais ces changements finiront-ils pas être dangereux pour les salariés une fois la crise passée ? Le cadre devra à ce moment reprendre sa forme assez rapidement, avec des règles à nouveau protectrices, en gardant peut-être des trouvailles qui ont fait consensus. Le Premier ministre Edouard Philippe a lui-même parler d’évolution ‘exceptionnelle’ et ‘transitoire’. Ce qui rejoint la réflexion d’un chef d’entreprise : ‘si jamais, le 1er mai, on peut ressortir acheter du muguet avec nos salariés, tous ensemble, on sera cette année très content d’assister à la fête du travail’.