Les mécontentements s’accumulent chez les agents dans les trois versants de la fonction publique – État, territoriale et hospitalière – qui sont appelés à faire grève et à défiler ce mardi. Revue des principales raisons de la colère.
● Salaires
Les fonctionnaires manifestent d’abord pour la défense de leur pouvoir d’achat. Après six années de gel, le point d’indice, qui sert de base au calcul de leur rémunération, a augmenté de 0,6 % en 2016, puis de nouveau de 0,6 % le 1er février 2017. Mais il a été à nouveau gelé en 2018 et le gouvernement a fermé la porte à une hausse en 2019. Néanmoins, le point n’est qu’un élément de la rémunération, qui évolue aussi en fonction de l’ancienneté, des primes, des promotions… De 2010 à 2016, le gel du point d’indice n’a pas empêché la rémunération moyenne des agents en place de progresser tous les ans (sauf en 2012 dans le secteur hospitalier). Par ailleurs, le gouvernement est ouvert à des hausses catégorielles pour certaines professions.
Autre sujet qui fâche : le fait que 2018 soit une année blanche pour l’accord de revalorisation des carrières (PPCR), l’actuel exécutif ayant décidé un décalage d’un an dans sa mise en œuvre pour économiser 800 millions d’euros. Ce plan, acté sous le gouvernement Valls, a un coût évalué à 11 milliards d’euros en cumulé jusqu’en 2021. Il reprendra en 2019.
Enfin, la hausse de la CSG sera juste compensée pour les fonctionnaires, alors que les salariés du privé gagneront en pouvoir d’achat avec la bascule des baisses de charges.
● Jour de carence
Les agents protestent également contre le retour du jour de carence en cas d’arrêt maladie. Très décrié par les syndicats de fonctionnaires, le jour de carence avait été mis en place en janvier 2012 sous le mandat de Nicolas Sarkozy puis supprimé en 2014 par François Hollande. Les députés ont voté son rétablissement dans le cadre du budget 2018.
En comparaison, trois jours de carence sont imposés dans le privé, mais l’employeur compense souvent la perte de rémunération. En octobre, le premier ministre, Édouard Philippe, avait justifié son rétablissement, en affirmant qu’il avait produit de « remarquables résultats» pour lutter contre le micro-absentéisme qui désorganise les services et coûte environ 170 millions d’euros par an.
● Effectifs et réforme de l’État
Les fonctionnaires montent aussi au créneau pour défendre leurs effectifs, alors que l’exécutif a confirmé la suppression de 120.000 postes d’ici à 2022, dont 50.000 dans la fonction publique de l’État et 70.000 dans les collectivités locales. Un levier pour réduire les dépenses publiques de trois points de PIB d’ici à 2022.
Pour y arriver, le gouvernement compte sur le numérique mais aussi sur une réforme de la fonction publique, déclinée en quatre chantiers et annoncée début février. Les concertations, qui ont débuté avec les syndicats sur le sujet, s’étaleront jusqu’en début d’année 2019, avant que ne soit présenté un projet de loi. Mais d’ores et déjà, les points de blocage sont nombreux. Le gouvernement veut étendre le recours aux contractuels pour les métiers n’ayant pas une spécificité propre au service public, tandis que les syndicats soulignent qu’ils étaient déjà 967.000 en 2016 (sur 5,7 millions d’agents publics). La rémunération au mérite et la simplification des instances de représentation du personnel ne plaisent pas davantage. Pas plus que la hausse de la prime de départ. Le terme de « plan de départ volontaire», employé en février par Gérald Darmanin, le ministre des Comptes publics, avait même braqué.
Les syndicats sont par ailleurs inquiets de ce que le gouvernement annoncera en juin en termes de réforme de l’État, de redéfinition des missions de service public et de lutte contre les doublons avec les collectivités locales.
● Défense des services publics
Au-delà de ces sujets propres aux agents, la contestation porte en elle un sujet de société. Pour tenter de sensibiliser le public à leur cause, les syndicats ont diffusé une « lettre aux usagers» des services publics. « Il ne s’agit pas […] d’une mobilisation sectorielle et catégorielle de privilégiés», écrivent les syndicats, mais de « défendre les services publics et les valeurs qu’ils incarnent : laïcité, égalité, gratuité, indépendance, solidarité».
Source : lefigaro.fr (22 mai 2018)