Accident et maladie du travail : les entreprises à la peine

Revue de Presse

Source : lexpress.fr (9 janvier 2019)

Déclarations tardives, incomplètes… les accidents du travail et les maladies professionnelles sont mal gérés en entreprise.

Le gouvernement devrait dévoiler cette semaine sa lettre de cadrage aux partenaires sociaux, qui sont invités à négocier, en vue d’un futur projet de loi, sur le sujet de la santé au travail. Il s’agit avant tout de revoir la prévention, et le rapport Lecocq a déjà apporté une pierre à l’édifice. Mais un baromètre publié en décembre éclaire la façon dont les entreprises gèrent après coup les accidents du travail (AT) ou les maladies professionnelles (MP). Elles peuvent mieux faire.  

Un accident du travail génère des obligations administratives pour l’employeur. Il lui faut notamment remplir un formulaire, à envoyer à la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) dans les deux jours. Or, seuls 62% des sondés déclarent envoyer systématiquement leurs déclarations d’AT dans les 48 heures, comme le prévoit la loi. 

‘Nous avons été étonnés de ces résultats, commente Xavier Bontoux, du cabinet Fayan-Roux, Bontoux & associés qui cosigne l’enquête avec le cabinet d’audit BDO. Quand l’entreprise manque à ses obligations, la facture peut être lourde. Les sanctions pénales demeurent rares, mais pas les sanctions civiles. L’employeur peut être amené à payer l’intégralité des conséquences financières du sinistre : les indemnités journalières, les prestations de soin, les médicaments… ainsi qu’une pénalité financière correspondant à toutes ces sommes multipliées par deux.’  

‘L’impact financier d’un accident du travail peut être très lourd’

Lorsqu’elle remplit, à la demande du salarié, le formulaire d’accident du travail, l’entreprise peut émettre des doutes sur son caractère professionnel. Elle remplit alors la case ‘réserves’. Un tiers des personnes interrogées déclarent se priver de cette faculté. C’est pourtant en fonction de ces bémols à la version du salarié que l’Assurance Maladie engage une enquête et que peut se dérouler une action en contradiction.  

‘C’est d’autant plus surprenant que nous avons surtout sondé des PME, pour qui l’impact financier d’un accident du travail peut être très lourd, s’étonne Xavier Bontoux. Avant 2010, l’employeur était redevable de sommes réellement engagées par l’Assurance Maladie : 50 euros de kiné, 30 euros de médicaments, etc. Désormais, un forfait conséquent s’applique, en fonction de la branche professionnelle. La branche AT/MP de l’Assurance Maladie n’est pas excédentaire pour rien !’ Sous-entendu : les entreprises paient désormais au prix fort la survenue d’un sinistre.  

Les risques psychosociaux de plus en plus générateurs d’AT/MP

Stress, dépression, burn-out… les AT/MP sont par ailleurs de plus en plus le fruit de risques psychosociaux (RPS). ‘En 2018, 12% des arrêts de travail dans le cadre d’un RPS ont été qualifiés en accident du travail et 16% ont débouché sur une maladie professionnelle, contre respectivement 9% et 13% en 2017’, indique le baromètre.  

 

L’enquête confirme que les entreprises ont beaucoup de mal à retrouver un nouveau poste aux salariés déclarés inaptes à la suite d’un AT/MP. 18% des sociétés interrogées ont eu recours au reclassement en 2018. Elles étaient 21% en 2017, 30% en 2016. C’est plus difficile encore pour les PME, dont la marge de manoeuvre est par nature restreinte : elles ont beaucoup moins de postes à proposer, voire aucun. 10% des entreprises interrogées ont ainsi été contraintes de licencier un collaborateur, faute d’une solution en interne.