Réforme des retraites : ces fonctionnaires qui pourraient voir leur pension diminuer

Revue de Presse

Source : capital.fr (30 juillet 2019)

La présentation des préconisations du haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye a soulevé de nombreuses questions chez les fonctionnaires. Les catégories les moins élevées et les enseignants craignent une baisse drastique de leurs pensions.

Les fonctionnaires seront-ils pénalisés par le régime universel des retraites ? La réponse est loin d’être claire. Comme souvent, il y a ceux qui pourront en profiter et les autres qui risquent d’y perdre quelques plumes. Car c’est un profond bouleversement de la retraite des fonctionnaires que préconise le haut-commissaire à la réforme des retraites dans son rapport. Fini le calcul de la pension sur les six derniers mois travaillés, c’est l’ensemble de la carrière qui serait pris en compte. Pour compenser cette évolution qui risque de diminuer le niveau des pensions, les primes devraient permettre de se constituer des droits. Enfin, les catégories actives de la fonction publique devraient s’éteindre progressivement et le compte professionnel de prévention (C2P), permettant notamment de partir à la retraite à 60 ans, pourrait être ouvert à certains agents publics.

Ces changements devraient principalement profiter aux catégories les plus élevées dans la hiérarchie dont le niveau moyen des primes représente entre 30 et 50% de la rémunération totale. “Il s’agit surtout des catégories A+ de direction, des membres des grands corps d’Etat”, détaille Luc Rouban, directeur de recherches au CNRS et membre du Centre de recherches de Sciences Po. Ce sont les mêmes qui devraient aussi bénéficier du calcul de la pension sur l’ensemble de la carrière. “Il s’agit de ceux qui sont tout de suite entrés dans les grands corps ou en tant que cadre supérieur de la fonction publique car ils ont passé directement les concours, estime Luc Rouban. A l’inverse, ceux qui ont commencé plus modestement et qui ont gravi des échelons via des concours internes seront pénalisés”.

A y regarder de plus près, la liste des perdants semble pour le moment beaucoup plus longue que celle des gagnants. “Je pense notamment aux aides soignantes de la fonction publique, pointe Dominique Corona, en charge du dossier des retraites pour l’Unsa. Aujourd’hui, elles font partie de la catégorie active et peuvent partir à la retraite dès 57 ans. Avec la réforme et l’alignement sur le privé, même si un compte de prévention est ouvert elles devront travailler au moins jusqu’à 60 ans, sans la garantie d’avoir un niveau de pension plus élevé ”, craint le syndicaliste. Autre souci, ceux qui touchent peu de primes ne pourront pas se créer de nouveaux droits. C’est le cas des catégories B et C de la fonction publique territoriale. “Le niveau moyen de leur prime est compris entre 10 et 15% de leur rémunération totale. Et il existe de fortes disparités d’une collectivité à une autre”, note Luc Rouban.

Le constat est le même pour les enseignants qui touchent très peu de primes. “D’après ce que nous a dit le haut-commissaire, si le niveau de rémunération des enseignants reste en l’état, ils pourraient être perdants au bout de huit ans après la mise en place du régime universel, soit pour ceux partant à partir de 2033”, détaille Dominique Corona. Et même s’il manque encore des précisions pour réussir à présenter des cas-types, les calculatrices commencent à chauffer. …/… Elle appelle de ses voeux à se mettre autour de la table, dès la rentrée, pour discuter de la revalorisation des rémunérations. “Aujourd’hui les salaires sont parmi les plus faibles des pays de l’OCDE et avec la réforme des retraites qui se dessine, le problème devient criant”, affirme Bernadette Groison. Sans cette réflexion autour de la rémunération, promise par le Président de la République lui-même lors de sa conférence de presse en avril dernier, la pilule de la réforme des retraites pourrait être difficile à avaler pour les enseignants.