Santé au travail : l’épineuse question des troubles psychiques

Revue de Presse

Source : laprovence.com (23 août 2019)

Les troubles psychiques représentent seulement 1,6 % des accidents du travail en France

Les femmes seraient la principale cibles des troubles psychiques au travail DR

Les troubles psychiques au travail ne sont pas toujours considérés comme des maladies professionnelles. Si l’Organisation mondiale de la santé a intégré le burn-out dans sa classification des maladies, des critères objectifs doivent être définis pour établir les symptômes de la pathologie. Pourtant, en France, 10 000 accidents du travail ayant pour cause des troubles psychiques ont été recensés en 2016, selon une étude parue dans la revue mensuelle Prescrire. Une donnée qui représente 1,6% des 626 000 accidents du travail reconnus cette année-là, contre 1% en 2011.

Dépressions, burn-out, troubles anxieux, états de stress post-traumatique, traumatisme psychologique… dans 58% des cas, ces troubles psychiques ont concerné des femmes. Pour expliquer ce phénomène, l’étude insiste sur l’exposition aux risques de surmenage dû à leur métier. Que ce soit dans le secteur médico-social, le transport de voyageurs et le commerce de détail, le constat est le même : les femmes sont plus touchées que les hommes.

Mais une fois cette affirmation actée, il faut regarder de plus près les résultats. L’absence de statut clair au sujet des troubles psychiques alliée à la faible partie de la population choisie pour l’étude (uniquement le secteur privé) ne permet pas d’établir une cartographie claire de la situation. Pour cause, il est aujourd’hui très difficile de faire reconnaître un trouble psychologique en accident du travail.

Le médecin du travail au centre du débat

Pour venir en aide aux personnes touchées, la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (Fnath) essaye de faire bouger les lignes.  ‘Les conditions juridiques pour faire reconnaître une maladie professionnelle sont draconiennes et conduisent à une sous-déclaration et une sous-reconnaissance massive de ces troubles. C’est pourquoi, souvent, nous conseillons aux salariés de faire reconnaître ces troubles en accident du travail’, précise l’institution.

Les affections psychiques ne sont pas inscrites au tableau des maladies professionnelles. Pour obtenir cette reconnaissance, le salarié doit justifier devant une commission d’un seuil d’incapacité de 25% et du lien direct et essentiel avec le travail. Une capacité professionnelle qui doit le plus souvent être déterminée par un médecin du travail. Problème là aussi : leur statut est de plus en plus menacé.

Les problèmes de dos loin devant

Fragilisée par le numerus clausus établi dans les années 80, la profession s’est vue amputée d’un grand nombre de représentants, ce qui a considérablement modifié leur quotidien. Protecteurs de l’aptitude au travail, ces médecins de terrain ont perdu une partie de leur fonction à la suite d’une loi votée en 2016 supprimant la traditionnelle visite médicale d’aptitude à l’embauche. ‘Aujourd’hui, cette visite est remplacée par un suivi individuel de santé qui est réalisé par un professionnel de santé qui peut être un médecin, un interne ou un infirmier de santé au travail’, décrit le professeur Marie-Pascale Lehucher-Michel, médecin du travail à l’AP-HM.

Pourtant, ce dernier a une place de choix dans l’entreprise pour comprendre et résoudre des problèmes d’ordre psychologique. ‘Le médecin du travail étudie les risques sur le terrain avec des analyses de poste, puis les salariés peuvent nous alerter à tout moment grâce à la visite à la demande’, prévient le médecin. Malheureusement de moins en moins d’entreprises possèdent un cabinet médical au sein de leurs locaux.

Ces pathologies ont coûté au total 230 millions d’euros à l’Assurance maladie en 2016. Un montant à relativiser au regard du poids des lombalgies (1 milliard) et des troubles musculo-squelettiques (800 millions) qui restent encore la principale source d’arrêt maladie en France.