Cette baisse vient alimenter les craintes de ceux qui redoutaient que la guerre des prix initiée par l’arrivée de Free dans le mobile en 2012 porte un coup aux investissements et, donc, à la qualité de service. Le gendarme des télécoms relativise ce coup de frein, alors même que les chiffres publiés font souvent l’objet d’une révision en fin d’année. « L’Arcep attend avec intérêt les chiffres des opérateurs en année pleine, pour voir s’il y a un rattrapage au deuxième semestre après un effet conjoncturel lié aux restructurations du secteur, ou bien si l’on est revenu au rythme des années 2004-2010, qui affichaient une moyenne de 6,2 milliards d’investissements », indique le régulateur. La situation diverge selon les opérateurs. « Si la tension sur les marges fait que les opérateurs n’ont plus le coeur ou la possibilité d’investir, ce n’est pas le cas d’Orange, affirme son directeur général adjoint Pierre Louette. Nous avons maintenu notre niveau au premier semestre en poursuivant les investissements dans le cuivre, la couverture, la fibre… » Il avoue toutefois que la trajectoire annuelle est en légère baisse « de quelques dizaines de milliers d’euros » par rapport aux 3 milliards consacrés à la France en 2013. Du côté de Free, on assure garder un rythme constant. Au premier semestre, le groupe a investi près de 20 % du chiffre d’affaires, soit plus de 400 millions d’euros, un chiffre en ligne avec les 900 millions d’euros de 2013. L’opérateur a accéléré le déploiement d’antennes mobiles afin d’atteindre son objectif de couverture de 75 % de la population en 3G en janvier 2015.
Pour expliquer le décalage, les regards se tournent plutôt vers SFR et, dans une moindre mesure, vers Bouygues Telecom. Le premier est en train d’être avalé par Numericable et la perspective de cette fusion se traduit par une forme d’attentisme. Des parties de réseaux SFR et Numericable devraient fermer pour développer des synergies. On assiste donc plutôt à un gel des investissements. Cela pose question, alors que le réseau mobile de l’opérateur a été victime de plusieurs pannes ces derniers mois – toutes ne relèvent cependant pas entièrement de sa responsabilité. Plus dur, en juin, l’ex-filiale de Vivendi a été déclassée pour la première fois en vingt ans sur la qualité de service, dépassée par Bouygues Telecom. SFR a notamment désinvesti dans la 4G, considérant que la nouvelle technologie ne serait pas tout de suite un relais de croissance, vu les tarifs peu élevés auxquels ses concurrents la vendent.
Le nerf de la guerre
Chez Bouygues Telecom, la première moitié d’année a aussi été agitée. Après sa tentative ratée de rachat de SFR, le groupe, courtisé par Orange et Free, a finalement décidé de lancer un important programme de restructuration pour survivre en solo. Les investissements dans le réseau mobile, dont une partie va être mutualisée avec SFR, n’ont pas forcément été la priorité, alors que l’importante couverture 4G du groupe (70 % de la population) a été réalisée l’an dernier grâce la conversion des antennes 1.800 MHz. « Les investissements demeurent le nerf de la guerre, commente Olivier Roussat, le PDG de Bouygues Telecom, qui assure que les montants ne devraient pas baisser sur l’année. On est engagé dans une course au débit dans le mobile. Et on ne peut pas se permettre de ralentir. » L’opérateur a d’ailleurs lancé et été la 4G+, qui permet d’offrir des débits deux fois plus rapides que la 4G classique. Le deuxième semestre devrait voir un rattrapage. Les investissements restent en effet vitaux pour les opérateurs, qui ne peuvent se permettre de les réduire sur le long terme, sous peine de perdre des clients.