Vivre pour le week-end peut-être le signe d’un burn-out

Revue de Presse

Source : huffingtonpost.fr (25 octobre 2019)

En théorie, le week-end permet de se couper volontairement du travail. Mais, en cas de burn-out, on oublie parfois jusqu’au plaisir de prendre une pause.

TRAVAIL – Le burn-out représente un réel risque professionnel, et il ne disparaît pas le vendredi. L’employé, fatigué, apathique, grincheux au bureau ne cessera pas de ruminer une fois chez lui. 

Selon la classification internationale des maladies établie par l’OMS, la simple surcharge de travail n’explique pas à elle seule le burn-out. L’impression d’être sous-employé y contribuerait également. Le burn-out se définit comme un stress chronique sur le lieu de travail qui engendre un sentiment d’épuisement, une démotivation et un cynisme croissants. 

Quand des pressions professionnelles conduisent au burn-out, on ne sait parfois plus comment profiter de son temps libre. On prend même de mauvaises habitudes le week-end, qui accroissent à leur tour la sensation d’épuisement le lundi matin. 

Les psychologues et les spécialistes en ressources humaines détaillent ici les habitudes dominicales qui contribuent au burn-out et proposent des solutions pour y remédier. 

Trop attendre des week-ends

Il y a une différence entre attendre avec impatience les réjouissances du week-end et ne vivre que pour ces moments-là. De fait, cette mentalité serait un signe de burn-out sous-jacent. “Les expressions ‘Je déteste le lundi’ ou ‘Vive le vendredi’ prêtent certes à sourire, mais le message qu’elles véhiculent, c’est ‘80% de ma vie est nulle’″, explique le psychologue clinicien Ryan Howes. 

“Lorsque les gens se mettent à diviser leur semaine, associant d’un côté le travail au négatif et, de l’autre, le week-end au positif, ils alimentent le problème. Ils passent leur temps libre à redouter le retour du lundi et la reprise du travail, à s’en plaindre, à ruminer.″ 

Solution : mettez un peu du week-end dans votre semaine, et trouvez d’autres occupations. “Si vous consacrez vos week-ends à vos amis, à vous reposer et à partir à l’aventure, trouvez le moyen d’intégrer cela à votre semaine de travail?″ suggère-t-il. En prenant par exemple votre petit-déjeuner avec un-e ami-e qui ne soit pas un-e collègue ou en allant à la librairie pendant la pause déjeuner. 

Quand son emploi tue à petit feu, ″il faut bien nourrir son âme“, explique Adriana Alejandre, thérapeute matrimoniale et familiale agréée. Selon elle, s’entourer de personnes distrayantes s’avère parfois bénéfique et s’essayer à la nouveauté permet de stimuler la curiosité. 

Quand on a le sentiment de ne pas être employé-e à sa juste valeur et de s’épuiser dans un emploi insatisfaisant, il est possible de trouver d’autres sources d’épanouissements, déclare Melody Wilding, assistante sociale agréée et coach professionnel. “Les week-ends offrent l’occasion parfaite de s’adonner à une nouvelle activité, faire du bénévolat ou se lancer dans un projet artistique. Tout ce qui peut vous donner le sentiment de vous impliquer davantage″, explique-t-elle. 

Penser sans cesse au travail et s’en plaindre continuellement

Si se plaindre à n’en plus finir de vos affreux collègues et de votre patron autoritaire durant le week-end apparaît au premier abord comme une façon d’évacuer le stress, ce rabâchage ne fait souvent qu’aggraver la situation sur le long terme. 

Quand, incapable de décharger ce que l’on a sur le cœur, on s’enferme dans ces émotions négatives, “il ne s’agit plus de s’épancher, mais de ressasser, radoter, accumuler des rancunes, signe que la verbalisation n’a pas l’effet escompté″, selon Ryan Howes. 

Solution : prenez du recul et réorientez vos pensées. ″Que puis-je y changer?” fait partie des questions de reformulation que les employés sont encouragés à se poser afin d’utiliser l’énergie négative à des fins plus productives. ″Vider son sac est censé entamer le processus de résolution du problème, et non devenir une fin en soi“, dit-il. 

Melody Wilding estime qu’un rituel de “purge cérébrale“, basé sur des questions invitant à la réflexion autour de la semaine de travail, permet de tourner la page avant le week-end. “Je constate que beaucoup de gens se jettent dans leur week-end sans avoir réellement pris le temps de décompresser″, ajoute-t-elle. 

Elle estime que certaines des questions à se poser aident à se concentrer sur le positif (″Qu’ai-je accompli cette semaine? Où ai-je progressé? Qu’aimerais-je améliorer?”) ou se projeter (“Quelles leçons puis-je en tirer pour avancer?″). 

En s’accordant ce moment de thérapie émotionnelle et mentale, on ne laisse pas les pensées professionnelles ″s’infiltrer et devenir cette présence envahissante qui hante nos week-ends”, poursuit-elle. 

Être complètement désinvesti, même sur son temps libre

Lorsque l’on est surmené-e, on a tendance à se concentrer sur le travail, le travail et toujours le travail, au risque d’éprouver des difficultés à vivre sa vie en dehors du cadre professionnel le week-end. 

“Je vois très souvent des gens tellement submergés par ce qu’ils ont à gérer ou ce qu’ils veulent faire au quotidien qu’ils déclarent forfait le week-end, si bien qu’ils ne profitent pas de ce temps pour se reposer. Ils s’abrutissent devant Netflix, durant des brunchs interminables ou toute autre activité qui les assurera de rester dans l’évitement.” 

Solution : agissez en pleine conscience. Cela ne signifie pas qu’il faille arrêter de regarder des films sur le canapé, mais faites-le sciemment. “Il n’y a aucun mal à partir sur un marathon Netflix tant que c’est pour les bonnes raisons, que vous le faites par choix, et que vous savez ce que vous comptez en retirer. Mais s’il ne s’agit que de ne penser à rien, de se cacher dans sa grotte, loin du monde, ce n’est pas sain.” 

La technologie vous contrôle, et non l’inverse

Garder son téléphone à proximité contribue au sentiment de rester à la disposition de son patron, même durant les congés. On se surprend même à relever ses courriels et ses notifications professionnels sans y prendre garde. 

En premier lieu, identifiez l’origine de ce besoin de disponibilité. “D’habitude, il prend sa source dans la peur. D’où le stress : on a peur, de rater quelque chose, de prendre du retard, de ne pas être prêt lundi”, rapporte Ryan Howes. 

Solution : limitez vos périodes de disponibilité et exprimez vos desiderata. Si vous ne restez joignable que par crainte qu’on ait besoin de vous, réfléchissez à la façon dont ce genre de pensées alimente le cycle du burn-out. “Si l’on dépend toujours de vous et si vous répondez ou interagissez sur votre temps libre, vous permettez aux autres de continuer à dépendre de vous. C’est une angoisse qu’il est très important de combattre″, explique Adriana Alejandre. 

Même si vous avez besoin que l’on puisse vous joindre, libre à vous de choisir le temps imparti au travail durant votre week-end, comme le suggère Melody Wilding : ″D’accord, vous devez rester joignable, mais pas sans un certain nombre de règles.″ 

Une fois vos limites établies, vous pouvez exprimer ces paramètres aux autres. ″Communiquez clairement vos horaires de travail, vos moments de disponibilité et d’indisponibilité, ainsi que le délai dans lequel vous reprendrez contact”, explique la thérapeute. 

Même sans être toujours responsable du burn-out, se donner les moyens de changer ce qui peut l’être.

Bien sûr, certains des facteurs aggravants du burn-out – patrons exigeants, échéances déraisonnables – ne dépendent pas de vous. Il faut tout de même y voir un signal, le besoin de changer ce qui ne fonctionne pas. Une fois la source systémique du burn-out identifiée, il vous revient de choisir si le fait de conserver ce travail est plus important que ses conséquences sur votre santé mentale. Une conversation avec votre responsable au sujet de vos attentes professionnelles s’impose peut-être, à moins qu’il faille être réaliste quant à vos priorités de carrière. 

D’ici là, sachez qu’il est possible de reconquérir ses week-ends. Même si guérir du stress du travail ne se fait pas sans effort.