Droit de retrait : coronavirus ou pas, l’exercer n’est pas toujours possible

Revue de Presse

Source : journaldunet.com (10 mars 2020)

[DROIT DE RETRAIT] Chaque salarié dispose d’un droit de retrait qui lui permet d’arrêter de cesser ses activités lorsqu’il s’estime confronté à un danger grave et imminent sur son lieu de travail. Un droit qui revient sur le devant de la scène avec l’épidémie de coronavirus qui touche la France.

[Mise à jour du mardi 10 mars 2020 à 15h40] Dans le cadre du coronavirus, si l’employeur met en œuvre les recommandations du gouvernement (comme éviter les déplacements professionnels dans les zones à risques et appliquer les mesures recommandées pour aménager les postes de travail en cas de retour d’un salarié de zone à risque ou de contact avec une personne infectée), les conditions ne sont pas réunies pour permettre au salarié d’exercer son droit de retrait. Le travailleur n’a pas alors un motif raisonnable de penser que son quotidien professionnel présente un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé. En revanche, si l’employeur ignore les recommandations du gouvernement, le travailleur peut légitimement exercer son droit de retrait jusqu’à ce que les préconisations soient finalement suivies.


Le principe du droit de retrait

Le droit de retrait permet à un salarié confronté à un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, c’est-à-dire à un événement susceptible d’entraîner, dans un délai brusque ou rapproché, une maladie ou un accident grave voire mortel, de cesser le travail tant que l’employeur n’a pas pris de dispositions adaptées. Pour les mêmes raisons, il peut quitter son lieu de travail afin de se mettre en sécurité. Cette décision de la part du salarié de cesser ses activités ne doit cependant pas créer un danger grave et imminent pour les autres salariés.

A la différence du droit d’alerte dont disposent les comités d’entreprise, le droit de retrait est un droit individuel. Il peut cependant s’exercer collectivement. En revanche, il ne doit pas être utilisé pour faire état de revendications professionnelles.


Qu’est-ce qu’un danger grave et imminent au travail ?

L’origine du danger grave et imminent encouru sur son lieu de travail peut être diverse. Il peut par exemple s’agir :

  • D’un véhicule ou tout autre équipement de travail défectueux et non conforme aux normes de sécurité
  • D’une absence d’équipements de protection collective ou individuelle
  • D’un processus de fabrication dangereux pour la santé
  • D’un risque d’agression.


Comment exercer son droit de retrait ?

Le salarié doit immédiatement avertir son employeur de son recours au droit de retrait. Aucune forme particulière n’est requise et aucune procédure interne ne peut être établie pour formaliser cette information. Cette dernière n’est pas une demande d’autorisation : l’accord de l’employeur n’est pas nécessaire. Bien qu’il n’y ait rien d’obligatoire, il est toutefois préférable de formaliser son droit de retrait par écrit. Le salarié n’a, par ailleurs, pas à prouver qu’il y a bien un danger. S’il le souhaite, le salarié souhaitant exercer son droit de retrait peut également passer par les représentants du personnel au comité économique et social (CSE).


Conséquences pour le salarié

Le droit de retrait ne peut pas être la cause de sanction pour le salarié, même si le danger était, en réalité, inexistant. Il suffit que le salarié ait pu croire à l’existence de ce danger. Sous respect de cette condition, aucune retenue sur salaire ne peut être effectuée, contrairement au droit de grève, ni aucune forme de sanction appliquée.

Tant que le danger grave et imminent persiste, l’employeur ne peut demander à son salarié de reprendre le travail. Alerté de ce danger, l’employeur risque même de commettre une faute inexcusable si le salarié est victime par la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.


Droit de retrait et arrêt de travail

La Cour de Cassation, dans un arrêt du 9 octobre 2013, a estimé qu’un salarié ne pouvait exercé son droit de retrait ‘que pendant l’exécution de son contrat de travail’. En conséquence, un salarié en arrêt de travail ne peut y avoir recours et bénéficier du maintien de la rémunération que prévoit ce dispositif.


Droit de retrait en cas de forte chaleur

Si l’extrême chaleur empêche d’exercer une activité professionnelle en toute sécurité, il est possible d’exercer son droit de retrait. Dans ce cas, l’employeur ne peut contraindre à la reprise du travail. Le droit de retrait en cas de forte chaleur n’est pourtant pas prévu par la législation. Dans le code du travail, il n’existe pas de seuil de température qui autorise le droit de retrait. La décision se fait donc au cas par cas.