Le télétravail n’est plus obligatoire, mais le présentiel pas encore de retour… Voici pourquoi

Revue de Presse

Source : ouest-france.fr (2 février 2022 )

Ce mercredi 2 février, la règle rendant le télétravail «  obligatoire » – trois à quatre jours par semaine pour les métiers qui le permettent – est abandonnée. Mais beaucoup d’entreprises n’entendent pas y renoncer tout de suite. Voici pourquoi.

Dans la centrale d’écoute de l’entreprise de télésurveillance Tunstall Vitaris, au Creusot, le système de jauge va être maintenu jusqu’à nouvel ordre. |

Alors que l’élection présidentielle approche, le gouvernement entend soigner le moral des Français, plombé par deux ans de contraintes liées à la pandémie. Ce mercredi 2 février, comme l’avait annoncé le Premier ministre Jean Castex le 20 janvier, certaines restrictions visant à lutter contre le Covid vont ainsi disparaître, alors même que le nombre de contaminations reste très élevé en France. Le port du masque ne sera plus obligatoire en extérieur, les jauges dans les lieux recevant du public assis (stades, établissements culturels…) sont abandonnées. Mais pas seulement.

Dans les entreprises, le télétravail que le gouvernement avait tenté depuis le 3 janvier de rendre obligatoire trois à quatre jours par semaine, « pour les postes qui le permettent », redevient seulement recommandé, précise le protocole sanitaire. Ce qui mettra fin aux amendes temporaires que pouvaient infliger les inspecteurs du travail.

L’effet vacances scolaires

Faut-il s’attendre à une reprise massive du présentiel ? Pas vraiment, au vu des témoignages que Ouest-France a recueillis. Il y a, évidemment, l’effet vacances scolaires, qui vont s’échelonner en France du 5 février au 6 mars. Par ailleurs, la communication du gouvernement avait pu faire penser, de prime abord, que ces règles étaient étendues jusqu’au dimanche 6 février. Plusieurs entreprises ont ainsi d’ores et déjà annoncé à leurs employés revenir à leurs accords traditionnels sur le télétravail – lorsqu’elles en ont – seulement à partir du lundi 7 février.

Enfin, le protocole sanitaire dit qu’à partir du 2 février « les employeurs fixent, dans le cadre du dialogue social de proximité, les modalités de recours au télétravail ». Une latitude que réclamaient les syndicats patronaux comme le Medef et la CPME, qui représente les petites entreprises. Mais sur le terrain, beaucoup de dirigeants préfèrent rester prudents.

Pas de changement de protocole chez Sanofi

Ainsi chez Sanofi, numéro un de la pharmacie avec 20 000 employés en France, les règles ne vont pas changer. « La situation épidémique n’étant pas encore stabilisée (cas COVID encore très importants, hausse des hospitalisations…), cela nous a conduits à ne pas faire évoluer ces mesures. Nous réévaluerons la situation d’ici quelques semaines », confie une porte-parole. Pour les métiers éligibles, le télétravail reste donc la norme trois jours minimum par semaine, tandis que « les déplacements des salariés doivent rester exceptionnels ».

Tunstall est un spécialiste de la téléassistance. Il compte 250 salariés, répartis entre son siège situé au Creusot, en Saône-et-Loire, et une quinzaine d’agences à travers la France dont trois dans le grand Ouest (à Nantes, Brest et Quimper). Ici, « un système de jauge par service et par bureau a été mis en place ces dernières semaines, détaille son président, Alain Monteux. Même si certains, comme les informaticiens, restent cinq jours en télétravail, tandis que nos installateurs ne peuvent pas le faire puisqu’ils se rendent au domicile des personnes âgées. »

La semaine dernière, le comité de direction de Tunstall a lui aussi décidé de poursuivre ce système au-delà du 1er février, en raison des incertitudes sur l’évolution de la situation sanitaire. « Nous sommes dans un métier humain, avec une centrale d’écoute 24 heures sur 24 qui vient en aide aux personnes âgées. Nos abonnés attendent que nous soyons joignables, je ne peux pas prendre le risque que toute mon équipe soit contaminée », explique Alain Monteux. Chez lui aussi, c’est l’évolution de la courbe du Covid qui dira quand les règles pourront évoluer. « Même si cela nous coûte en productivité », reconnaît-il.

Cette perte de productivité, il l’évaluait à 40 % au début de la crise en mars 2020, quand il avait soudainement fallu mettre tous les salariés en télétravail et que les outils et usages n’étaient pas encore adaptés. Il l’estime désormais à 10 %. Elle est heureusement compensée par la forte croissance annuelle de l’entreprise (aux 25 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2021), de l’ordre de 10 %.

Ne pas décourager les jeunes

D’autres, comme Stedy, font le choix d’un entre-deux. Entre Marseille et Paris, ce cabinet de conseil en nouvelles technologies et en industrie compte, lui, 50 salariés. Ici, 80 % des salariés ont moins de 35 ans. Impossible de leur suspendre brutalement le télétravail auquel ils tiennent tant, raconte Édouard Bliek, le directeur général de l’entreprise. Avant le protocole du 3 janvier, les équipes disposaient d’un jour de télétravail fixe.

Pour tenir compte des injonctions du gouvernement, deux jours de télétravail hebdomadaires variables, afin de tourner dans les bureaux, avaient été instaurés ces dernières semaines. Impossible néanmoins de pérenniser ce système, selon Édouard Bliek. « La crise a fait évoluer les mentalités. Mais nous sommes une jeune structure, il nous faut garder les liens entre les personnes, continuer à bien se connaître… » Stedy a décidé de couper la poire en deux : à partir du lundi 7 février, les salariés disposeront de deux jours de télétravail : un fixe et un variable. Un acquis social remporté à la faveur de la crise.