La loi El Khomri en route vers le 49-3

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Source : lejdd.fr (8 mai 2016)

Une ultime réunion a eu lieu dimanche soir à l’Élysée pour décider du sort du projet de loi Travail mais les jeux étaient déjà faits

C’était le week-end de la dernière chance. Le gouvernement, le rapporteur Christophe Sirugue (PS) et les députés frondeurs tentaient d’ici dimanche soir de s’entendre sur les amendements au texte El Khomri contesté par une partie de la gauche, la CGT, FO et l’Unef. Une ultime réunion prévue dimanche soir à l’Élysée entre le chef de l’État, le Premier ministre, la ministre du Travail et le rapporteur. L’Assemblée nationale reprend lundi l’examen de cette réforme, entamé mardi dernier et dont elle n’a toujours pas discuté le moindre amendement.

« Il ne faut jamais renoncer à un moyen constitutionnel »

Un accord paraît peu probable. Le projet de loi risque d’être privé de majorité. Selon les calculs du gouvernement, un vote contre de 10% des députés socialistes conduirait au rejet du texte, donc à un échec politique majeur pour le couple exécutif. Or les frondeurs et des aubrystes s’y opposent fermement sur plusieurs points. « Il y a de leur part un blocage et une radicalisation alors que nous sommes en phase avec l’immense majorité du groupe », déplore-t-on au sein de l’exécutif.

Manuel Valls devrait, selon toute probabilité, engager l’article 49-3 de la Constitution, qui permet l’adoption d’un texte sans vote, sous réserve qu’une motion de censure ne soit pas déposée et majoritaire. Il l’avait fait l’an passé pour la loi Macron. Le Premier ministre en a laissé à nouveau planer l’hypothèse vendredi soir sur Public Sénat : « Il ne faut jamais renoncer à un moyen constitutionnel. » La procédure nécessite une délibération en Conseil des ministres. Celle-ci pourrait avoir lieu mercredi.

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Cinq mille amendements ont été déposés

Le gouvernement entend aussi s’épargner de longues séances de critiques dans l’hémicycle, sachant que 5.000 amendements ont été déposés. « On ne va pas organiser un Festival de Cannes pour le noyau dur des opposants », tonne Jean-Marie Le Guen, ­secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement.

Au cœur du bras de fer, le fameux article 2 consacre la primauté des accords d’entreprise sur les accords de branche. C’est « l’inversion de la hiérarchie des normes », qui met les frondeurs vent debout. Ils y voient une porte ouverte aux reculs ­sociaux. « Une rupture philosophique avec l’histoire de la gauche », dit Benoît Hamon. Christophe Sirugue a tenté, en fin de semaine, de proposer que les branches puissent avoir un « pouvoir suspensif » sur les accords d’entreprise. En vain. « Je me démène mais j’ai l’impression de faire bouger plus facilement le gouvernement que les collègues », observe-t-il. D’autres articles suscitant également la polémique, sur la définition des licenciements économiques, par exemple. Les syndicats contestataires ont prévu de nouvelles manifestations jeudi.