La loi Travail n’affaiblit pas les droits des salariés, bien au contraire

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Source : lesechos.fr (23 août 2016)

C’est une erreur de dire que la loi Travail est la casse sociale de trop. Elle offre de nouvelles garanties aux salariés et les accords les plus favorables seront toujours appliqués.

La loi portée par Myriam El Khomri, qui ambitionne de remodeler les relations sociales , a donné lieu à un florilège de critiques infondées et de grossières contre-vérités. La plupart reposent sur des approximations, de la manipulation, de la mauvaise foi ou parfois de l’ignorance. Les leaders syndicaux , toujours vent debout contre cette loi promulguée, semblent oublier qu’elle entérine seulement, et sans l’aggraver, un mécanisme inscrit dans notre droit du travail, depuis 12 ans !

En effet la loi du 4 juillet 2004 autorisait déjà à fixer par accord d’entreprise des règles différentes, et le cas échéant, moins favorables que celles de la convention collective de branche, sauf lorsque celle-ci l’interdisait formellement. Les thématiques exclues de ces « dérogations » étaient les salaires minimaux, les classifications, la couverture santé et prévoyance et la mutualisation de la formation professionnelle.

L’accord favorable prime toujours

Par ailleurs, la loi du 20 août 2008 permettait en matière de durée du travail, à quelques exceptions près, – telles que les majorations pour heures supplémentaires – de passer outre aux interdictions imposées par les branches. Mais la loi Travail a réintroduit, in extremis, les verrouillages conventionnels, y compris en ce qui concerne le temps de travail. Elle autorise également les partenaires sociaux à définir un ordre public sectoriel qui s’imposera aux accords d’entreprise. Ce texte injustement vilipendé maintient donc le statu quo versus loi du 4 juillet 2004…

Les textes ne remettent pas non plus en cause le principe de faveur existant entre les autres sources de droit. C’est donc toujours l’avantage le plus favorable qui s’appliquera si l’accord d’entreprise s’avère par exemple moins généreux que le contrat de travail. Or il est fréquent que ce dernier contractualise, sous forme de copier-coller, ceux accordés par les accords collectifs. Ce qui constituera là encore un nouveau cliquet de sécurité pour les salariés.

Les salariés mieux couverts

Et ce n’est pas tout … La loi dite « El Khomri » instaure de surcroît de nouvelles garanties. Le Code du travail précisera, sur le modèle de ce qui vient d’être fait pour la durée du travail, les congés payés, les jours fériés et les congés divers, quels sont les droits auxquels il est impossible de déroger, y compris par convention de branche.

Quant aux accords d’entreprise, ils devront désormais être signés par des syndicats ayant obtenu au 1er tour des dernières élections des titulaires du comité d’entreprise (ou à défaut des délégués du personnel), 50 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives, et non plus seulement 30% des voix.

Les directions obligées de consentir des avantages

Voilà qui devrait en principe mettre à l’abri contre la conclusion d’accords organisant un recul social, signés sous la pression d’un chantage à l’emploi ou ne suscitant pas l’adhésion des salariés. Et ce, d’autant plus que les intéressés peuvent sanctionner les syndicats signataires lors des prochaines élections. Quoiqu’il en soit, ce type d’accord s’est avéré jusqu’à présent très exceptionnels. En atteste, la maigre dizaine d’accords majoritaires de maintien de l’emploi remettant en cause des avantages existants, et ce malgré la crise.

Le pire n’est donc pas sûr. Bien au contraire. Car pour conclure des accords d’entreprise mieux adaptés aux réalités du terrain et vraiment opérationnels, les directions devront, pour leur part, consentir d’autres avantages en contreparties. C’est-à-dire avec à la clé, du mieux-disant social !