Le travail partagé séduit de plus en plus

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Source : lefigaro.fr (28 octobre 2016)

Le « job sharing» est une forme particulière de temps partiel où un poste à temps plein est partagé par deux personnes en temps partiel. Peu connue en France, il se développe de plus en plus en Europe.

Concilier vie professionnelle et vie personnelle est un casse-tête pour de nombreux de salariés. Pourtant, dans certains pays, cela semble possible grâce au travail partagé, plus connu sous son appellation anglaise le job sharing. Le principe : deux salariés à temps partiel se partagent un poste. L’intérêt? Pouvoir prétendre à des postes à responsabilités dont le temps de travail ne peut généralement pas être divisé, tout en bénéficiant des avantages du temps partiel.

Ce concept se développe en Europe depuis quelques années. Une enquête publiée en 2016 par European Trade Union Institue confirme que le job sharing est en plein essor en Europe. En 2013 déjà, Anna Kaiser et Jana Tepe avaient fondé en Allemagne Tandemploy, une plateforme qui met en relation demandeurs d’emploi et entreprises et qui permet aux demandeurs de trouver le partenaire idéal avec qui partager un poste. Cette plateforme a depuis 2015 un équivalent britannique, la plateforme Juggle Jobs.

Il existe deux formes de job sharing : le job splitting, où deux salariés à mi-temps se répartissent la charge de travail d’un même poste en fonction de leurs compétences, et le job pairing, où deux employés possédant les mêmes compétences se relayent à un même poste. Dans les deux cas, les employés organisent entre eux le temps et la répartition de travail.

Une forme de travail qui séduit de plus en plus de cadres en Europe

Face aux évolutions de l’économie, l’idée de partager le travail paraît nécessaire à de plus en plus de salariés. En France, certains salariés ont déjà choisi de répartir leur temps de travail entre plusieurs entreprises, ce qui leur permet de s’adapter aux besoins ponctuels et temporaires de nombreuses entreprises, et en particulier des PME. Le multisalariat, qui propose une nouvelle forme de collaboration entre professionnels et entreprises, semble de plus être une solution de choix pour réduire le chômage.

Le job sharing ne séduit pas seulement les mères de famille cherchant à concilier travail à responsabilités et vie de famille. Selon Tandemploy, 30% des postulants à un job sharing sont des hommes. Les jeunes professionnels, les personnes ayant des enfants ou des proches à leur charge, mais aussi les seniors qui aspirent à rester actifs et à transmettre leurs connaissances tout en travaillant moins, sont également séduits par le job sharing. Ce mode de salariat facilite également la réintégration de personnes ayant temporairement quitté le marché du travail. Les avantages sont également nombreux pour les entreprises, qui accueillent deux personnes qualifiées et complémentaires au lieu d’une seule : les salariés en job sharing seraient également plus épanouis et moins sujets au burn out ou au stress au travail.

Pour autant, ce mode de travail reste encore très peu répandu en France. A ce jour, la législation française ne présente aucune disposition particulière en matière de job sharing : « les salariés en job sharing seront soumis à la législation sur le temps partiel», explique au Figaro Maître Olivier Dutheillet de Lamothe, avocat associé chez CMS Bureau Francis Lefebvre. Le Code du travail français présente même plusieurs freins à la mise en place du job sharing. « Les temps partiels ont une durée minimale de 24 heures hebdomadaires : une addition de deux temps partiels équivaudrait donc à un temps complet de 48 heures, ce qui est largement au-dessus des 35 heures et pourrait poser problème», explique au Figaro Maître Sylvain Niel, directeur associé chez Fidal. « De même, une situation dans laquelle deux cadres en forfait jour tiennent un même emploi et se partagent équitablement un nombre de jours dans l’année paraît difficilement envisageable au regard du Code du travail actuel».