Religion en entreprise : le « mode d’emploi» du gouvernement

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Source : liberation.fr (04 novembre 2016)

Port du voile, de la kippa, prière, jeûne : le ministère du Travail dévoilera lundi son guide des pratiques religieuses en entreprise. De quoi aider les employeurs pas toujours au clair sur ces questions.

Peut-on interdire à un salarié de porter la kippa ? De faire le ramadan ? De faire la prière ? Voici les questions auxquelles le guide pratique du fait religieux dans les entreprises privées, qui sera présenté lundi par Myriam El Khomri, la ministre du Travail, veut tenter de répondre. Annoncé mi-septembre par Clotilde Valter, la secrétaire d’Etat à la Formation professionnelle, dans le cadre d’un colloque sur le sujet organisé par l’Institut Montaigne, ce guide est issu des échanges entre partenaires sociaux, dans le cadre du Comité de suivi des attentats de janvier 2015.

Son but : accompagner salariés et employeurs face aux situations qui se posent à eux au travail. Et éclaircir des cas de figure qui interrogent aujourd’hui bon nombre d’acteurs, souvent par manque de connaissance du droit. Ou encore du fait d’une mauvaise interprétation du principe de laïcité qui, contrairement à la fonction publique, ne s’applique pas dans le privé.

Des situations concrètes précises

Consulté jeudi par l’AFP, ce document « mode d’emploi», selon Valter, rappelle plusieurs principes de base, comme l’interdiction pour un employeur de demander sa religion à un candidat ou de la mentionner dans une offre d’emploi, de refuser une demande de congé en raison de son motif religieux, et pour un salarié de désobéir à sa supérieure parce qu’elle est une femme, de faire du prosélytisme en entreprise, de s’absenter sans autorisation pour célébrer une fête religieuse ou encore de ne pas se soumettre à la visite médicale obligatoire en raison de ses convictions.

Pour ce faire, le guide se base sur 39 situations concrètes précises. Exemple avec le cas d’un salarié qui « refuse d’être en contact avec la viande de porc» alors qu’il a été « recruté comme boucher» et n’avait fait valoir « aucune objection lors de son recrutement». Selon le guide, l’employeur a dans ce cas la possibilité de le sanctionner. Autre situation : un règlement intérieur d’une entreprise peut-il prévoir l’interdiction de porter le voile, la kippa ou le turban sikh ? Oui, si ces tenues ont une « conséquence en matière de sécurité, ou d’hygiène ou d’organisation du travail», mais « pas en raison de [leur] caractère religieux».

Le ramadan ne peut être interdit

D’autres questions concernent la prière. Le guide rappelle que l’employeur peut l’interdire pendant le temps de travail, mais pas pendant les pauses « si cela ne perturbe pas l’organisation du travail». Il peut, en revanche, interdire aux salariés de prier dans une salle de réunion et n’est pas obligé de mettre à disposition une salle de prière, même si plusieurs salariés le lui demandent.

Le ramadan, lui, ne peut être interdit, mais le salarié peut être « retiré de son poste de travail» s’il n’est pas en capacité de travailler « dans les conditions de sécurité requise». L’employeur peut aussi « procéder à un changement d’affectation» ou « aménager les horaires de travail». En dernier recours, « si aucun aménagement ne peut être mis en place» et « si l’impossibilité d’exécuter le travail désorganise» l’entreprise, « le licenciement peut être envisagé» pour « trouble objectif causé dans l’entreprise», mais « pas pour faute».