Médias, télécoms : « La convergence est une nécessité »

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Source : lejdd.fr (13 novembre 2016)

Fini l’époque où chaque protagoniste se cantonnait à son domaine. Chaque opérateur voit son rôle se réduire et le combat pour acquérir de nouveaux abonnés devient de plus en plus rude.

La bataille fait rage dans les médias et les télécoms. Après la mégafusion de l’américain ATT avec Time Warner, les Européens doivent se faire une place dans la bataille mondiale. Fini l’époque où chaque protagoniste se cantonnait à son domaine – télécommunications, médias, Internet.

« Il n’y a plus de pré carré, chaque acteur évolue vers une convergence entre l’accès au réseau, le contenu et la publicité, c’est-à-dire la monétisation des audiences », explique Emmanuel Forest, directeur général adjoint du groupe Bouygues. « Des géants ont déjà émergé en Amérique, avec des puissances numériques colossales, comme Google, Netflix ou Amazon, ainsi que les acteurs des télécoms? : Comcast, Verizon ou ATT », constate Michel Combes, PDG de SFR et directeur général d’Altice. Cela leur permet de faire des investissements massifs dans les infrastructures et les contenus. « La convergence est une nécessité, estime Maurice Lévy, le patron de Publicis. Parce que chaque opérateur voit son rôle se réduire et que le combat pour acquérir de nouveaux abonnés devient de plus en plus rude. » Le contenu est indispensable pour le détenteur des tuyaux qui transporte l’information afin de fidéliser les utilisateurs.

« Les règles sont inadaptées »

Mais les acteurs européens sont bridés par une Europe qui les empêche de se consolider. « Les règles de la concurrence risquent de nous emmener dans le mur, ajoute-t-il. Elles sont inadaptées face à l’émergence de champions du numérique, qui vont être multiformes, à la confluence de l’accès, du contenu et de la publicité et qui seront les géants de demain. » D’autant plus que l’Europe s’ouvre aux groupes extérieurs, notamment américains.

« La réglementation européenne est trop lourde et dès que vous modifiez un élément, cela fait bouger d’autres dominos et donc on crée des usines à gaz, regrette Christophe Thoral, président de Lagardère Studios. Vous ne pouvez pas avoir sur un même marché des acteurs étrangers qui échappent à la régulation et des européens qui sont sur-régulés. Le millefeuille réglementaire français s’ajoute à la législation européenne », déplore Maryam Salehi, directrice déléguée de NRJ group.

Maurice Lévy plaide pour un chantier de simplification des règles européennes qui ne se limite pas au numérique. « Nous avons laissé les technocrates européens édicter un certain nombre de règles absurdes dans le fonctionnement, même si leurs intentions de départ étaient valides, qu’il s’agisse de défendre le consommateur et la culture. Résultat? : nous avons des débats sur le devenir de l’Europe. »

Les grands champions américains ne vont-ils pas avaler les petits européens ? Pour Jake Donavan, directeur général Europe de LionTree, société de conseil spécialisée dans le secteur des médias et télécoms et acteur majeur des récentes acquisitions de Liberty Global, Verizon, Charter Communication? : « L’objectif des régulateurs était de maintenir une très forte concurrence pour faire baisser les prix des abonnements Internet, télé ou câble afin de protéger le consommateur, du coup, les acteurs européens n’ont pas les mêmes moyens pour investir que leurs concurrents américains. » Des propos salués par Maurice Lévy et Michel Combes, pour qui « la bataille technologique ne se joue plus en Europe mais aux États-Unis et en Chine. En France, la non-consolidation du secteur conduit à un sous-investissement et à la destruction massive d’emplois ».