Le don de RTT bientôt ouvert aux fonctionnaires

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Source : liberation.fr (4 avril 2015)

BONNE NOUVELLE Depuis un an, les salariés peuvent offrir un jour de repos à leurs collègues devant s’occuper d’un enfant malade. Mais ce don n’est pas encore autorisé dans le public, l’ application de la loi ayant pris du retard.

Les fonctionnaires devront encore attendre quelques jours avant de pouvoir bénéficier du don de RTT. La loi permettant de céder des jours de repos à des collègues devant s’occuper d’un enfant gravement malade est pourtant en vigueur depuis près d’un an dans le privé. Soit depuis le vote du texte, dit loi Mathys, en mai 2014. Mais elle n’est toujours pas appliquée dans la fonction publique, son décret d’application n’ayant pas été soumis à l’organisme de concertation compétent. Un problème de calendrier en passe d’être réglé a assuré, vendredi, la ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, au micro de RTL. « Nous allons faire passer un texte le 14 avril prochain devant le conseil commun de la fonction publique, et je pense que l’ensemble des employeurs publics et des organisations syndicales seront tout à fait d’accord pour qu’on puisse publier ce décret au mois de mai», a-t-elle promis en réponse à une controverse naissante

Depuis quelques jours, la situation d’un couple de policiers, dont la fille de cinq ans est atteinte d’une tumeur cérébrale incurable et n’a plus que quelques mois à vivre, avait soulevé un vaste mouvement de solidarité et d’incompréhension. Plusieurs collègues des parents avaient proposé de faire don d’un ou plusieurs jours de RTT aux deux agents afin qu’ils puissent rester auprès de leur fillette. Mais leur volonté d’entraide se heurtait au vide réglementaire. « On veut ne rien regretter, on ne veut pas passer nos journées au travail et ne pas profiter d’elle, car elle a douze mois à vivre!», avait fait savoir la mère de la petite fille. Le père de l’enfant évoquait lui la « colère» et le sentiment de « gâchis». Poussé par leur appel, l’exécutif a donc décidé de forcer l’agenda des partenaires sociaux afin d’ouvrir ce droit à l’ensemble des salariés dès le mois de mai. Sans que cela n’efface les limites et les critiques autour de ce dispositif.

Une procédure très encadrée.
La loi de mai 2014 autorise un salarié à « renoncer anonymement et sans contrepartie» à des jours de repos au bénéfice d’un autre salarié de l’entreprise ayant la charge d’un enfant âgé de moins de 20 ans atteint d’une maladie, d’un handicap ou victime d’un accident rendant indispensable une « présence soutenue». Elle précise que le caractère indispensable de cette présence doit être attesté par un médecin. Par ailleurs le don doit recevoir l’accord de l’employeur. Enfin si tous les types de jours de repos (RTT, jours de récupération ou congés payés ordinaires) sont concernés, les salariés sont obligés de conserver 24 congés annuels ordinaires et ne peuvent donc céder que ceux au-delà de ce seuil

Un droit qui pourrait être étendu.
Pour certains, la mesure, qui ne porte que sur les enfants de moins de 20 ans, est trop restrictive. En février, la polémique est montée autour d’une entreprise de Saint-Etienne, dans laquelle les employés, en accord avec la direction, avaient décidé d’offrir des RTT à une collègue dont la fille de 31 ans est atteinte d’un cancer. Sauf que la démarche est illégale au sens strict de la loi. Une « aberration», selon ces employés. L’élargissement du dispositif aux enfants plus âgés avait pourtant été évoqué par Catherine Deroche, sénatrice rapporteure du texte, lors de la remise de son rapport en 2014. Elle expliquait alors que « deux types de compléments [étaient] susceptibles d’être apportés à terme au texte proposé». L’accompagnement des enfants de plus de 20 ans en faisait partie, mais aussi celui des conjoints gravement malades. Mais depuis, le sujet n’a pas été mis à l’agenda politique.

Une loi qui ne fait pas consensus
Lors de son vote à l’Assemblée nationale en 2012, puis deux ans plus tard au Sénat, les parlementaires de gauche ont mis en avant le risque inégalitaire du dispositif. Les sénateurs du groupe communiste étaient notamment opposés à l’idée de faire peser sur les salariés une mission qui aurait dû relever, selon eux, de la solidarité nationale. Et ce d’autant plus que des dispositifs existants permettant déjà d’organiser l’absence des parents auraient pu être renforcés (dont le congé pour enfant malade, de soutien familial, de présence parentale, de solidarité familiale). D’autres élus ont aussi souligné le caractère inégalitaire de ce droit pour les salariés des PME qui, contrairement à ceux des grandes entreprises, ne peuvent pas se voir offrir le même nombre de jours de congés. « Il y a également inégalité entre les salariés en raison de leur place dans la hiérarchie, de leur capital de sympathie, de leur personnalité», notait par ailleurs Martine Billiard (PC), lors des débats