L’État s’inquiète d’un espionnage d’Orange par la Chine

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Source : journaldugeek.com (10 mars 2017)

Le partenariat mondial conclu entre Orange et Huawei sur le cloud hérisse l’administration française qui craint un espionnage en règle des clients et dirigeants d’Orange par la Chine, révèle le Canard Enchaîné.

Branle-bas de combat à l’Élysée, une réunion « ultra-secrète » s’est tenue au Palais en fin d’année dernière. La crème du renseignement français était réunie pour l’occasion, s’est laissé dire le Palmipède. Soit, « une dizaine de hauts fonctionnaires représentants la DGSE, la DGSI, le coordinateur national du Renseignement, le secrétaire général de la défense, mais aussi Bercy ». L’objet de cette réunion au sommet ? Officiellement, il s’agissait d’évoquer le cloud souverain, beau gâchis qui n’a désormais de souverain que sa territorialité (entités de droit français). Officieusement, l’État soupçonne la Chine de vouloir espionner les dirigeants et clients de l’opérateur historique, dont l’État fait partie.

Huawei, agent chinois ?

Sous contrat avec Orange pour le cloud public, l’administration française s’inquiète du récent partenariat mondial conclu – en catimini – avec le chinois Huawei. L’État, qui détient 23 % de l’opérateur historique, est sous contrat avec Orange Business Services (OBS) pour la fourniture de services Iaas (Infrastructure as a service), l’une des trois principales catégories de cloud computing. Problème, avec ce nouveau partenariat mondial, le fabricant chinois fournira à Orange les équipements matériels et logiciels nécessaires du cloud public, en l’occurrence le frameworkcloud open source Open Stark (serveurs, commutateurs et surtout stockage de données). Orange fournira de son côté les data centers, le réseau et la sécurité. Mais la perspective que « Huawei puisse disposer d’un double des clés des clouds d’Orange bourrés de données sensibles donne des sueurs froides aux services ».

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Pourquoi une telle défiance ? Tout simplement parce que Huawei a été créée « par un ex-colonel de l’armée chinoise » et que la firme est « abreuvée de contrats militaires par Pékin », souligne le Canard.

Orange, le business avant tout

Chez Orange, on se veut rassurant : ce partenariat ne concernera que les « ‘services de cloud public’ et pas les données sensibles ». Mais l’opérateur ne manque pas de mettre l’État face à ses responsabilités, sous couvert d’anonymat cela s’entend : « En autorisant Free comme quatrième opérateur, l’État a déclenché une guerre des prix », dénonce la source. Avant d’ajouter : « Si on veut rester compétitifs sans avoir à licencier, il faut bien qu’on noue des alliances avec les acteurs les moins chers du marché, comme Huawei » . C’est moche, mais business is business.

Du côté des espions français, on regrette que l’État n’a pas fait preuve d’autant de zèle que le Royaume-Uni : pour espérer faire son entrée sur le marché britannique, Huawei a dû montrer patte blanche et laisser le GCHQ (homologue britannique de la NSA) vérifier la fiabilité de ses produits, notamment l’absence de backdoors, non sans collecter au passage quelques « renseignements sur la technologie chinoise » se serait émerveillé un barbouze français. Une précaution jugée inutile jusque là… L’État français pourra peut-être compter sur la collaboration de Huawei qui a récemment accueilli Jean-Louis Borloo au sein de son Conseil d’administration.