Pourquoi le télétravail peine à se développer dans la fonction publique

Revue de Presse

Source : bfmtv.com (3 février 2019)

 

Le décret de 2016 prévoit que le télétravail est organisé au domicile de l’agent ou, éventuellement, dans des locaux professionnels distincts de ceux de son employeur public et de son lieu d’affectation. – Loïc Venance-AFP

Le télétravail n’a pas encore révolutionné la fonction publique. Loin s’en faut. La direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) fait un bilan de son déploiement très progressif, depuis le décret (daté du 11 février 2016) qui encadre le recours au télétravail dans la fonction publique.

L’intérêt de ce rapport officiel tient au fait qu’il s’appuie sur une enquête de terrain réalisée auprès de collectivités locales, de services de l’État et d’établissements publics. Des entretiens ont été menés avec des fonctionnaires télétravailleurs et d’autres managers d’équipes à distance.

Les télétravailleurs apprécient la diminution du stress

Du côté des points positifs affichés par des agents télétravailleurs interrogés, ‘la réduction de la fatigue liée au temps de transport et la diminution du stress lié à l’urgence du quotidien sont les deux bénéfices les plus fréquemment évoqués’ explique le document. La principale difficulté mentionnée est d’ordre technique. Sont en cause les accès distants aux applications informatiques, la faible dématérialisation des procédures et des déconnexions régulières ce qui réduit la portée des dispositifs de télétravail.

De leur côté, les administrations sont censées veiller aux conditions matérielles d’exercice du télétravail. ‘Certaines administrations autorisent le télétravail après avoir vérifié (par photos) l’espace dédié de l’agent au télétravail, d’autres n’exigent qu’une attestation sur l’honneur’ relève le rapport. Certains ministères vont jusqu’à fournir des conseils ergonomiques d’installation du poste de travail du télétravailleur (cf infographie ci-dessous)

Le lieu de télétravail des agents publics en question

‘L’ensemble des agents rencontrés dit avoir gagné en efficacité avec la mise en place d’une nouvelle organisation du travail qui fonctionne mieux, un partage des tâches dans la semaine qui permet de moins se disperser et la satisfaction d’avancer mieux et plus vite’ souligne le rapport de la DGAFP.

10000000000003c0000002c46e6dd9e74d18a0eb.jpgCertains ministères, comme celui de l’Agriculture, dans leur note de gestion, fournissent des conseils ergonomiques d’installation du poste de travail. –

En revanche, l’encadrement évoque une rigidité quant à la définition du lieu d’exercice du télétravail par le décret de 2016. Ce texte édicte que le télétravail est ‘organisé au domicile de l’agent ou, éventuellement, dans des locaux professionnels distincts de ceux de son employeur public et de son lieu d’affectation’. Or, à titre d’exemple, l’arrêté ministériel concernant les agents d’administration centrale travaillant auprès du Premier Ministre, restreint cette ‘ouverture’ dans la mesure où il autorise le télétravail seulement dans un télécentre public agréé, excluant donc les espaces privés de coworking.

Dans d’autres cas, le rapport cite le cas d’agents de préfecture qui souhaiteraient télétravailler dans une sous-préfecture proche de leur domicile mais qui ne sont pas considérés comme télétravailleurs au sens du décret.

Le télétravail s’organise en journée entière seulement

La répartition du temps de travail exercé par les agents télétravailleurs n’est pas non plus simple à gérer par les employeurs publics. Le plafond maximum a été fixé à trois jours par semaine, mais ensuite les arrêtés ministériels ont souvent imposé le regroupement par journées. Or, de nombreuses DRH rêveraient de souplesse et de gestion de plus fine, comme la possibilité d’organiser le télétravail de leurs agents par demi-journée.

Les réticences de l’encadrement sont aussi un frein à l’essor du télétravail. ‘Beaucoup d’encadrants, réfractaires au télétravail, avance l’importance du relationnel dans leur management, craignant que le télétravail altère ce mode de gestion de leurs équipes. D’autres encadrants expriment des craintes quant au volume de travail réalisé et lie fortement présence au travail et effectivité du travail’ explique le rapport. 

Enfin, la demande formelle de télétravail exprimée par l’agent à son supérieur hiérarchique est souvent l’épreuve de vérité pour les deux parties. ‘Derrière l’acceptation ou le refus de la demande, et au-delà de la faisabilité technique et organisationnelle, c’est la reconnaissance de la capacité de l’agent à télétravailler qui se joue. Et celle du courage managérial qui est posée’ conclut le document…

Quelle prise en charge des coûts liés à l’exercice du télétravail?

Le décret de 2016 précise que l’employeur public ‘prend en charge les coûts découlant directement de l’exercice des fonctions en télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci’. Certaines organisations syndicales demandent que le forfait internet, les frais d’électricité et de chauffage soit également pris en compte dans le montant de l’indemnité.

De son côté, le guide Télétravail de la DGAFP renvoie à chaque employeur les modalités de prise en charge des coûts, précisant que les dépenses de mise en conformité des installations électriques pour installer l’ordinateur ou le boîtier de connexion internet n’ont pas vocation à être prises en charge par les employeurs.