Les cancers d’origine professionnelle encore « sous-déclarés »

Revue de Presse

Source : lacroix.com (12 avril 2019)

Une «  part non négligeable » des cancers d’origine professionnelle n’est pas déclarée par les assurés, estime le rapport «  Santé travail  : enjeux et actions » de l’Assurance maladie publié ce jeudi 11 avril. En cause  : une longue période de latence entre l’exposition aux facteurs cancérigènes et la survenue d’un cancer (20-40 ans), ainsi que la méconnaissance des risques et de leurs droits par les salariés.

Entre 2003 et 2017, l’Assurance maladie a reconnu en moyenne 1 800 cancers d’origine professionnelle par an, la majorité concernant des hommes retraités issus de la classe ouvrière. Mais «  une part non négligeable » de ces cancers n’est pas déclarée, estime le rapport «  Santé travail  : enjeux et actions » publié jeudi 11 avril par la Caisse nationale d’assurance maladie.

Cancers d’origine professionnelle  : 1 800 cas reconnus par an, liés principalement à l’amiante

Souvent, les assurés sont «  découragés par l’ampleur des démarches administratives », et méconnaissent «  les risques, ainsi que leurs droits ». Il existe aussi «  une longue période de latence entre l’exposition aux produits cancérigènes et le diagnostic du cancer » (entre 20 et 40 ans), une maladie souvent due à de «  multiples facteurs ».

Un enjeu financier

Résultat, le nombre réel de nouveaux cas de cancers d’origine professionnelle chaque année est très incertain. Dans son plan cancer 2014-2019, l’Institut national du cancer évoquait un nombre situé entre 14 000 et 30 000. Santé publique France estime pour sa part à 12 800 le nombre de nouveaux cas en 2018.

Une chose est sûre   : la «  sous déclaration » des maladies d’origine professionnelles a des conséquences sur les finances de la sécurité sociale puisque les malades sont à la charge de la branche «  maladie » et non de celle des «  accidents du travail et maladies professionnelles ».

L’impact financier de cette «  sous-déclaration » de certaines maladies professionnelles a été évalué en 2017. Il représenterait entre 695 millions et 1,3 milliard d’euros, dont 45 % à 65 % liés à des cancers professionnels.

Mais au-delà de la juste imputation de ces coûts entre les branches de la Sécurité sociale, la non-déclaration empêche les assurés de bénéficier d’une rente au titre de la réparation des préjudices subis. Elle s’élève à environ 17 000 € par an. L’accès des assurés à leurs droits «  reste un sujet prioritaire de la convention d’objectifs et de gestion 2012-2022 de la branche accidents du travail et maladies professionnelles » précise le rapport.

Améliorer la détection

Un dispositif de repérage des cancers de la vessie a été initié en 2008 dans six régions de France, et généralisé en 2015 à toute la France. En conséquence, le nombre de cancers de la vessie reconnus d’origine professionnelle a augmenté de 40 cas en 2008, à 310 en 2017.

Il s’agit maintenant d’élargir cette initiative à d’autres types de cancers, notamment les leucémies, les cancers des fosses nasales et des sinus, et les cancers du poumon, semblant être les plus concernés par la «  sous-déclaration » en maladie professionnelle.

L’Assurance maladie explique que les très petites entreprises (moins de 50 salariés) seront ciblées en priorité. En effet, les cancers professionnels reconnus sont surreprésentés dans les entreprises de plus de 250 salariés.

Accompagner les demandes

La sous-déclaration s’explique aussi par la méconnaissance des démarches administratives à effectuer. La branche accidents du travail – maladies professionnelles prévoit donc d’expérimenter fin 2019 un dispositif personnalisé d’aide à la déclaration des maladies professionnelles. Cet accompagnement sera adapté aux besoins de chacun, allant d’une brochure précise à l’aide au remplissage des questionnaires.

L’Institut national du cancer a également développé sur le site e-cancer.fr des outils visant à aider les médecins généralistes à reconnaître les cancers professionnels, et à accompagner les patients dans leur demande de reconnaissance en maladie professionnelle.

Ces efforts semblent aller dans le bon sens, puisqu’en vingt ans, le nombre total de cancers reconnus d’origine professionnelle a été multiplié par 3.6. La France est, avec l’Allemagne, l’un des deux pays qui reconnaît le plus de cancers professionnels en Europe.