L’arrivée de Free Mobile en janvier 2012 a déclenché une révolution. Un mois plus tôt, en décembre 2011, personne n’imaginait que 36 mois plus tard SFR serait vendu et que Bouygues Telecom serait aux prises avec un plan social d’envergure et des profits réduits à la portion congrue. En décembre 2011, il y avait trois mastodontes parfaitement identifiés ; Orange, SFR et Bouygues Telecom, et deux marginaux, Free et Numericable.
À l’automne 2014, Numericable est en passe de devenir le numéro deux français des télécoms après avoir absorbé SFR. Et Free préfère se concentrer sur son rêve américain de rachat de T-Mobile, plutôt que d’examiner le rachat de Bouygues Telecom.
Un monde nouveau
Un monde ancien a disparu, un monde nouveau est en train d’émerger. Cette révolution est le fruit de la conjonction de trois facteurs. La technologie, la pression des consommateurs et les décisions réglementaires. La technologie a poussé à une convergence entre la téléphonie fixe et mobile, obligeant les acteurs positionnés uniquement sur l’un des deux à tenter des paris. Free a débarqué dans le mobile quand Bouygues Telecom a débarqué dans le fixe. La pression des consommateurs a joué un rôle essentiel. Free a fait exploser les standards, imposant des forfaits mobiles à 20 euros là où la norme était plutôt de 50 à 80 euros. La division par deux ou trois des prix a fortement déstabilisé les grands groupes, dont les coûts de structures étaient taillés pour des revenus élevés. La réglementation (gouvernement et régulateur Arcep) a accéléré ce processus en autorisant l’arrivée d’un quatrième opérateur mobile sans étude d’impact préalable. La concurrence a joué à plein, favorisant les plus agiles et pénalisant ceux qui n’y étaient pas suffisamment préparés.
Ce nouvel univers des télécoms a aussi changé de point de vue sur les médias. Xavier Niel, le fondateur de Free, qui s’opposait au transfert d’argent des télécoms vers les médias, est désormais pris d’une frénésie de rachat d’actifs médias. Avec Pierre Bergé et Mathieu Pigasse, il a mis la main sur Le Monde, Le Nouvel Obs et a fait une offre sur LCI. Quant à Patrick Drahi, le patron d’Altice-Numericable, il a signé son entrée dans la cour des grands des télécoms, par le rachat de Libération.