Télécoms : le coronavirus ampute les revenus du « roaming »

Revue de Presse

Source : lesechos.fr (16 avril 2020)

Les avions étant cloués au sol, les frais d’itinérance prélevés par les opérateurs télécoms en cas de déplacement à l’étranger pourraient baisser de moitié pour tomber à 25 milliards de dollars, selon

Selon Juniper Research, les revenus du «  roaming » (frais d’itinérance) rapportent environ 51 milliards de dollars chaque année aux opérateurs télécoms du monde entier. (Ludovic Marin/AFP)

La fermeture complète de l’aéroport d’Orly depuis deux semaines et les avions cloués au sol à Roissy se «  voient » désormais dans les comptes… des opérateurs télécoms. L’arrêt du tourisme international est en train d’amputer les revenus du «  roaming », ces frais supplémentaires prélevés par les opérateurs télécoms lorsque leurs abonnés voyagent à l’étranger.

Selon Juniper Research, les frais d’itinérance génèrent chaque année environ 51 milliards de dollars pour l’industrie mondiale des télécoms. Dans le pire des scénarios, la moitié (soit 26 milliards) pourrait être perdue dans les neuf prochains mois. Dans le détail, 13 milliards partiront en fumée cet été. «  Les opérateurs télécoms dans les pays les plus exposés au tourisme, comme l’Italie, l’Espagne, la Grèce mais aussi la France, seront les plus touchés », prévient Carlos Winzer, vice-président chargé des télécoms chez Moody’s.

En France, selon nos informations, les revenus du roaming ont déjà baissé de 70 % en mars chez SFR. Orange et Bouygues Telecom s’attendent eux aussi à un déclin, sans toutefois donner de chiffres. Free, pour sa part, précise que ces revenus ne représentent «  plus grand-chose » depuis que l’opérateur a permis à ses abonnés d’utiliser leur forfait mobile d’origine sans surcoût dans 70 pays du monde entier. «  On est vraiment dans l’épaisseur du trait », dit-on chez Free.

De la marge pure

Certes, les frais d’itinérance ne représentent que 6 % des revenus totaux des opérateurs télécoms dans le monde, selon Juniper. Et seulement 1 % pour les opérateurs européens, selon Moody’s. Car après une longue bataille, les frais de roaming ont été supprimés en 2017 par Bruxelles à l’intérieur de l’Union européenne.

Depuis, les opérateurs télécoms du Vieux Continent encaissaient donc uniquement le roaming extra-européen, entrant et sortant. Ce qui continuait de rapporter gros, en France, Paris étant la première destination touristique mondiale avec plus de 50 millions de visiteurs en 2019 dont 16,6 millions d’étrangers, selon la région Ile-de-France.

Mais la crise du Covid-19 a fait disparaître ces flux dans les deux sens. Les millions de Chinois ou d’Américains n’arpentent plus les rues de la capitale. Les Européens annulent eux aussi leurs vacances. Or «  le roaming, c’est de la marge pure, On facture une minute d’appel à 40 ou 50 centimes, et 1 ou 2 euros le giga de données, sans aucun coût supplémentaire pour l’opérateur ».

Un secteur moins touché

L’impact exact du roaming se verra sur le chiffre d’affaires des opérateurs, mais il sera en revanche limité sur l’Ebitda et neutre sur le cash-flow. Car les opérateurs n’auront plus à interconnecter les appels et feront donc des économies de coûts.

Au final, les opérateurs télécoms pourraient davantage être pénalisés par la disparition d’une certaine partie de leurs clients professionnels, surtout les TPE et PME fragilisées par la crise. En comparant à la crise de 2008, Moody’s estime que les mauvaises créances des opérateurs pourraient augmenter de 50 %, pour avoisiner 1,5 % des revenus en moyenne. Soit davantage que les revenus du roaming.