Télécoms : ces opérateurs « super-light » qui vendent même leurs antennes

Revue de Presse

Source : lesechos.fr (2 novembre 2021 )

Si les cessions de réseaux passifs se multiplient dans les télécoms, la vente des équipements actifs, comme les antennes, est longtemps restée taboue. Pourtant certains opérateurs, comme Polsat en Pologne ou Síminn en Islande, ont franchi le pas.

Que serait la SNCF… sans son réseau ferré ? Ou EDF sans ses centrales nucléaires ? Dans les télécoms, pourtant, la tendance au «  super-light » commence à apparaître. Certains opérateurs, qui jusque-là vendaient surtout leurs infrastructures «  passives » (tels les pylônes) à des fonds pour récupérer du cash, commencent aussi à vendre leurs équipements actifs, comme les précieuses antennes qui émettent le signal 4G ou 5G à destination des abonnés.

C’est par exemple ce que vient de faire Síminn, l’opérateur historique en Islande. Fin octobre, celui-ci a vendu l’intégralité de son réseau fixe et mobile (actif et passif) au fonds français Ardian pour environ 500 millions d’euros. «  C’est la tendance du moment, constate Gonzague Boutry, managing director au sein de l’équipe infrastructure d’Ardian et responsable des télécoms. De cette façon, les opérateurs peuvent se concentrer sur le service et le contenu. A l’avenir, les réseaux télécoms vont devenir une commodité. »

Avant lui, le groupe polonais de médias et de télécoms Cyfrowy Polsat avait vendu en février ses 7.000 tours et environ 37.000 antennes actives à Cellnex, le champion espagnol des infrastructures mobiles, pour 1,6 milliard d’euros. Ces opérateurs optent donc pour un modèle proche des MVNO (les opérateurs virtuels type Auchan Mobile)  : ils ne conservent que le coeur de réseau (la partie la plus critique), le portefeuille de clients… et les fréquences, le «  pétrole » des télécoms.

Les antennes, le nerf de la guerre

Vendre ses antennes est tout sauf anodin pour un opérateur. Même si les telcos peuvent dans certains cas conserver les logiciels qui les pilotent à distance, cela revient à confier les clés de la maison à un partenaire. «  On rentre dans le nerf de la guerre, confirme Jean-Michel Salvador, analyste chez AlphaValue. C’est un modèle qui ne peut se développer que si le nouveau propriétaire apporte un vrai avantage concurrentiel. »

Iliad cède une partie de ses tours mobiles en Pologne

Pour cette raison, les opérateurs ont longtemps rechigné à vendre leurs équipements actifs. Orange, par exemple, vient d’ouvrir ses 26.000 pylônes en France et en Espagne à la concurrence : les autres opérateurs pourront y greffer leurs propres antennes, mais les antennes d’Orange resteront bien… chez Orange.

Mais ce «  tabou » est progressivement en train de tomber, alors que les opérateurs veulent tous profiter des hauts niveaux de valorisation des infrastructures télécoms. A cela s’ajoute le fait que la 5G a poussé les opérateurs à partager leurs antennes (accord de mutualisation), ce qui a contribué à faire changer les mentalités.

La moitié des 450.000 tours d’Europe vendues

Pour autant, la vente des équipements actifs n’aura jamais la même ampleur que les cessions des infrastructures passives. Ces dernières années, la moitié des 450.000 tours d’Europe continentale ont été vendues à des sociétés spécialisées, comme Cellnex ou ATC, selon AlphaValue. Vendre l’actif est une option possible pour les petits opérateurs, mais moins pour les grands opérateurs historiques…

Par ailleurs, entretenir une antenne coûte cher et elle devient plus vite obsolète qu’un simple pylône de métal. «  En relatif, la valeur dégagée est donc plus faible », conclut Cellnex.