Source : bfmtv.com (15 mars 2022 )
Successions à la tête d’Orange, épisode 2. Après la bataille pour la direction générale, qui reviendra finalement à Christel Heydemann, la course à la présidence tourne aussi à la guerre interne. Les syndicats d’Orange, CFE-CFC, CFDT et CGT, s’opposent à deux des trois candidatures : celles de Jacques Aschenbroich et Patricia Barbizet. Le président de Valeo et l’ancienne numéro deux de Kering seront tous les deux âgés de 67 ans lors de l’assemblée générale du 19 mai prochain. Or, pour réaliser un mandat de quatre ans, ils dépasseront la limite d’âge statutaire de 70 ans pour le président.
Le groupe prévoit ainsi de relever ce seuil à 75 ans pour permettre à l’un et l’autre de pouvoir être nommé. Mais lundi, le fonds commun de placement entreprise (FCPE) des salariés, deuxième actionnaire d’Orange, a voté contre la résolution qui prévoit ce changement de statut. Les trois syndicats, qui dirigent le FCPE, s’opposent de fait à ces deux candidats.
Craintes de coupes dans les effectifs
Leur fronde vise surtout Jacques Aschenbroich, dont le profil ne plait pas. ‘Nous souhaitons un dirigeant qui connait le monde du numérique et pas un industriel…’ dit sobrement Vincent Gimeno, administrateur salarié de la CFDT d’Orange. Les syndicats ciblent les 12.000 suppressions de postes que Jacques Aschenbroich a réalisées chez Valeo l’an passé. Et craignent que sa nomination ne conduise à des purges chez Orange.
Les syndicats mettent un vrai frein au processus de nomination du président d’Orange. D’abord car ces deux candidats font partie des trois qui ont été sélectionnés par le conseil d’administration du groupe. Ensuite, car ils vont obliger l’Etat, actionnaire à 23%- à se positionner. Avec 40% des droits de vote effectif en assemblée générale, il pèse davantage que les 15% de votes des salariés. Mais outrepasser le choix des syndicats serait politiquement risqué dans une entreprise où les aspects sociaux comptent beaucoup. Contacté, Bercy n’a pas souhaité commenter.
Duo de femmes
Patricia Barbizet se retrouve de facto aussi ciblée par ce vote des salariés même si elle jouit auprès d’eux d’une meilleure image. Elle pourrait d’ailleurs en profiter alors qu’elle semble être la favorite de l’Etat. Il se murmure d’ailleurs que le ministre de l’Economie Bruno Le Maire, verrait bien un duo de femmes à la tête d’Orange après avoir poussé Christel Heydemann.
Preuve que la bataille pour la présidence est loin d’être terminée, le nom de Nicolas Dufourcq circule à nouveau dans les couloirs d’Orange. Il a longtemps été administrateur et visait le poste de PDG. ‘Il serait un président de poids pour épauler Christel Heydemann, cela aurait du sens’, explique un dirigeant du groupe qui pousse pour lui. Le modèle du duo Jean-Pierre Clamadieu-Catherine MacGregor chez Engie est mis en avant. ‘Ceux qui craignent d’être écartés par Heydemann militent pour Dufourcq, espérant qu’il sera un contre-pouvoir’, décrypte un autre dirigeant d’Orange. Ça devient Dallas!’.
Christel Heydemann a en tout cas reçu de l’Elysée le feu vert pour peser sur le choix du président afin d’éviter la même situation que chez Engie, première saison, lorsque la directrice générale Isabelle Kocher s’écharpait avec son président Gérard Mestrallet.
Stéphane Richard continue de peser
Reste un acteur de poids dans la bataille : Stéphane Richard. Celui qui est encore PDG jusqu’au 4 avril pousse dans le même sens que les syndicats. Lors du conseil d’administration en février, il a manifesté sa perplexité à changer les statuts pour la présidence. Soulignant au passage que les candidatures de plus de 66 ans ne pouvaient pas réaliser un mandat et que relever la limite d’âge à 75 ans ne leur permettrait pas d’en réaliser un second, selon plusieurs sources. De là à penser que Stéphane Richard pourrait se maintenir à la présidence…
Le temps presse. Le conseil d’administration a prévu de trancher le 30 mars prochain pour avoir le temps d’inscrire la nomination du président aux résolutions de l’assemblée générale du 19 mai. S’il n’y parvient pas, Stéphane Richard se tient prêt à jouer encore un peu les prolongations… D’ici là, la CFE-CGC d’Orange sort le bazooka et ‘invite fermement les acteurs du groupe à éviter les pressions sur ses membres pour tenter de faire changer le vote du FCPE’. Ambiance.