.La suprématie Orange remise en cause
Orange redoute que cette fusion ne vienne entraver ses résultats sur le segment des particuliers mais pas seulement. La société dirigée par Stéphane Richard a également toutes les raisons d’appréhender les conséquences que l’absorption de SFR va avoir sur le marché des professionnels. Premier FAI pour les entreprises avec plus de 60 % du marché, Orange a la cote auprès des PME, tendance qui devrait être revue à la baisse lorsque SFR fera jeu commun avec Completel, le pendant entreprise de Numericable. La branche pro de SFR revendique déjà une place significative dans ce secteur, place que l’opérateur au carré rouge compte bien voir grandir de manière conséquente grâce à son rapprochement avec Numericable. Réseaux et clientèles une fois réunies, les deux opérateurs occuperont entre 20 et 25 % du marché et tablent sur des prévisions à hauteur de 30 % du secteur fixe. Un objectif qui donnera à ce nouvel ensemble les moyens de rivaliser avec un Orange tout-puissant et de proposer aux dirigeants d’entreprises un choix parmi des offres de services solides, choix jusqu’ici plutôt limité.
Une concurrence qui va jouer sur les prix et qui inquiète les acteurs du B to B
C’est donc près de 90 % du marché du B to B qu’Orange et Numericable-SFR vont occuper d’ici quelques mois. Une situation que les autres acteurs spécialisés du marché voit arriver d’un très mauvais œil. Fin mai, cinq opérateurs télécoms ont écrit une lettre à la Commission européenne pour l’alerter sur l’intention de l’Arcep de ne plus encadrer les prix de gros que pratique Orange dans les zones très denses. Autrefois appliquée en raison de la situation de monopole d’Orange, cette régulation des prix ne trouverait plus de légitimité alors que la concurrence dans les très grandes villes existe et qui plus est destinée à être de plus en plus présente.
Les signataires de la lettre, les sociétés Colt et Nerim en tête, ont peur qu’une fois qu’Orange sera confronté aux effets de l’association Numericable-SFR, l’entreprise procède à une baisse de ces tarifs afin de rester compétitive. « Cela créerait des incertitudes à un moment crucial pour le marché français des télécoms, peut-on lire dans la missive. (…) Ce manque de visibilité pour les opérateurs alternatifs intervient au moment même où des fusions dans les télécoms surviennent touchant le marché des entreprises (celle de SFR et de Numericable et la potentielle fusion entre Orange et Bouygues Telecom) ». Malgré cette demande, il semblerait que l’Arcep veuille étendre la dérégulation des tarifs d’Orange à d’autres zones.
Alors que le rachat de SFR par Numericable n’est pas encore finalisé, ni même validé par l’Autorité de la concurrence, ses répercussions dans le monde des télécommunications se font déjà sentir. Dans cette histoire, les principaux gagnants ne seront pas les opérateurs qui sauront s’en tirer avec plus de clients ou de parts de marché mais bien les dirigeants d’entreprise qui vont pouvoir désormais profiter d’un choix enrichi de possibilités. Une concurrence accrue qui devrait également inciter les opérateurs à redoubler de vigilance quant à la qualité de leurs services. Il y a quelques mois, l’Arcep commandait plusieurs études concernant les principaux opérateurs français. L’une d’elle touche particulièrement l’activité pro d’Orange et l’autorité de se questionner sur la « baisse significative de la qualité de service des offres de gros destinées au marché entreprise » qui serait constatée depuis quelques mois.