Vers une simplification de l’accès au télétravail pour les fonctionnaires ?

Revue de Presse

Source : capital.fr (27 janvier 2020)

Dans le cadre de la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019, le gouvernement prévoit d’assouplir le recours au télétravail pour les agents, selon un projet de décret que Capital a pu consulter. L’idée serait de leur permettre de télétravailler de manière ponctuelle, en cas de grèves dans les transports par exemple. Mais pas seulement ! Explications.

Un texte qui tombe à pic. Alors que les grèves dans les transports franciliens s’enchaînent depuis le 5 décembre dernier, un projet de décret du gouvernement, que Capital s’est procuré, prévoit de nouvelles règles plus souples pour le recours au télétravail dans les trois fonctions publiques (territoriale, hospitalière et d’Etat). Pour rappel, “les agents de la fonction publique ont déjà la possibilité de télétravailler. Mais le système actuel l’organise pour un recours de manière régulière uniquement”, explique Christophe Pichon, avocat associé en droit public au sein du cabinet CVS.

Plus en détail, depuis la publication d’un décret en février 2016, les fonctionnaires peuvent avoir recours au télétravail… sous certaines conditions. Ainsi, selon ce texte, le télétravail doit être régulier et mis en place dans le cadre d’une autorisation, dont la durée est d’un an au maximum. Il doit également porter sur des jours fixes (tous les mardi par exemple, ou bien le premier lundi de chaque mois…). Autrement dit, le fonctionnaire doit décider un an à l’avance des jours pendant lesquels il veut télétravailler. Par ailleurs, s’il télétravaille, l’agent de la fonction publique doit respecter une règle  :  être présent sur son lieu de travail deux jours par semaine au moins. Le plafond est donc fixé à trois jours de télétravail par semaine.


Publication du décret officiel prévue d’ici mars prochain

Avec ce nouveau projet de décret, dont la version officielle doit être publiée d’ici le début du mois de mars 2020, il devrait être plus simple pour les fonctionnaires d’avoir recours au télétravail. “Ce texte permet d’organiser de manière plus souple le recours au télétravail, soit pour répondre à un besoin ponctuel, soit pour mieux organiser son activité”, résume Christophe Pichon. Dans le détail, “l’une des nouveautés de ce projet de décret, c’est la possibilité de faire du télétravail en cas de difficultés ponctuelles, comme des grèves par exemple”, indique l’avocat. Ainsi, “lorsqu’une situation inhabituelle perturbe temporairement l’accès au site de travail ou le travail sur site”, l’agent n’aurait qu’à demander une “autorisation temporaire” de télétravail à sa hiérarchie, peut-on lire dans ce texte du gouvernement.

Un second type d’autorisation serait mis en place  :  une autorisation dont la durée ne serait plus limitée dans le temps (contre un an actuellement). Dans ce cas, le fonctionnaire pourrait choisir ses jours de télétravail selon deux modalités  :  soit en faisant une demande de jours fixes par semaine ou par mois, soit en faisant une demande de jours “flottants” par semaine, par mois ou par an (deux jours par mois par exemple, sans spécifier à l’avance de quels jours il s’agirait). Ce type d’autorisation pourrait donc concerner un recours régulier ou ponctuel au télétravail.

Autre nouveauté  :  en cas de recours ponctuel au télétravail en raison d’une situation inhabituelle, l’agent pourrait déroger à la règle de présence minimale sur son lieu de travail (deux jours par semaine au moins). Autrement dit, il n’aurait plus l’obligation de respecter le plafond de trois jours de télétravail par semaine.


Plus de possibilités pour le lieu de télétravail

Par ailleurs, le projet de décret du gouvernement prévoit quelques aménagements concernant le lieu d’exercice du télétravail. Ainsi, le texte de 2016 actuellement en vigueur restreint cette pratique au domicile du fonctionnaire ou à des locaux professionnels déterminés par son administration.

Mais en réalité, selon le bilan 2018 du déploiement du télétravail dans la fonction publique, réalisé par la Direction générale de l’administration et de la fonction publique, “certains arrêtés ministériels ont exclu toute possibilité pour l’agent d’exercer dans un autre lieu que le domicile ou l’autorisent de façon exceptionnelle. C’est ainsi le cas de l’arrêté ministériel pour les services du Conseil d’Etat et des juridictions financières […], ainsi que de l’arrêté ministériel du ministère des Affaires étrangères.” Autre exemple  : “l’arrêté ministériel pour les agents d’administration centrale des services du Premier ministre autorise le télétravail dans un télécentre public agréé, ce qui exclut de fait les espaces privés de coworking”, dépeint le rapport. Un encadrement très contraignant, donc.

Du coup, le projet de décret ouvre le plus largement possible les lieux à partir desquels un agent pourrait télétravailler  : à son domicile, dans un autre lieu privé, ou dans tout lieu à usage professionnel. Comprendre  :  le fonctionnaire pourrait télétravailler d’où il veut, à partir du moment où son administration considère que le lieu offre des conditions de travail satisfaisantes. Les espaces de coworking seraient donc autorisés. Attention toutefois, le projet de décret permettrait à l’employeur de refuser la prise en charge du coût de la location d’un espace destiné au télétravail.

Enfin, ce texte apporte certaines garanties aux fonctionnaires. D’abord, l’administration de l’agent aurait un délai d’un mois au maximum pour apporter sa réponse à une demande de télétravail. Ensuite, en cas de refus de télétravail, tous les fonctionnaires pourraient saisir deux instances de dialogue sociale : la commission administrative paritaire ou la commission consultative paritaire. Actuellement, le décret de 2016 autorise seulement les fonctionnaires d’Etat à y avoir recours.