Source : l esechos.fr (30 juillet 2020 )
Orange et SFR ont tous les deux réussi à amortir le choc de la crise. Le confinement a provoqué une ruée vers la fibre qui génère de nouveaux abonnés. Les opérateurs vont toutefois devoir relancer les ventes de smartphones et leurs investissements dans les réseaux.
Jusqu’à quel point les opérateurs télécoms ont-ils « bien résisté » à la crise du Covid ? La publication, jeudi, des résultats du deuxième trimestre d’Orange et de SFR, les premiers opérateurs du marché français à dévoiler leurs chiffres, permet d’y voir plus clair.
Chez Orange, le chiffre d’affaires a progressé de 2,7 % en France pour atteindre 4,5 milliards d’euros, alors qu’il était resté quasi inchangé au premier trimestre. La rentabilité progresse elle aussi, puisque l’Ebitdaal (c’est-à-dire après loyer) augmente très légèrement de 0,5 % sur le semestre à 3,3 milliards. « C’est un beau résultat, surtout quand on voit les mauvaises nouvelles qui s’égrènent tous les jours dans les autres secteurs de l’économie », s’est félicité Stéphane Richard, le PDG d’Orange.
« Les résultats d’Orange reflètent une bonne résilience dans un contexte opérationnel pourtant très difficile », estime Carlos Winzer, vice-président senior chez Moody’s. Au niveau global cependant, la mauvaise performance de l’Espagne et du reste de l’Europe tire le groupe vers le bas. Son chiffre d’affaires tous pays confondus est en recul de 0,4 % tandis que l’Ebitdaal décline de 1,8 %. Le résultat net accuse une baisse de 10 % sur le semestre.
En France, SFR voit aussi ses ventes augmenter. Elles affichent une hausse de 0,2 %, à 2,6 milliards d’euros mais son Ebitda ajusté décline de 1 %, à 1 milliard d’euros. « En France, nous avons maintenu de la croissance au deuxième trimestre dans notre activité-coeur des télécoms », écrit Patrick Drahi, le patron du groupe Altice (maison mère de SFR), dans un communiqué. Elle reste toutefois plus faible qu’au premier trimestre lorsque SFR avait vu ses ventes progresser de 3,6 %.
Les résultats du premier trimestre avaient en effet mis en évidence la relative résilience du secteur, liée au modèle économique de l’abonnement qui permet aux opérateurs vendant un service essentiel en période de confinement d’encaisser des revenus quoi qu’il arrive. Mais la période de janvier à mars n’incluait que deux des sept semaines du confinement. Les nouveaux chiffres suggèrent qu’Orange comme SFR ont réussi à traverser le gros de la crise sans trop de heurts.
Ces deux performances s’expliquent surtout par la conquête de nouveaux abonnés sur la fibre.Sur la période, Orange a recruté 238.000 nouveaux clients fibre, un record pour un deuxième trimestre. Au même moment l’année dernière, l’opérateur historique n’avait en effet gagné « que » 160.000 clients. SFR a séduit 100.000 nouveaux clients fibre au deuxième trimestre, là aussi davantage qu’au printemps 2019 (71.000). « Dans cinq ans, plus personne n’aura l’ADSL en France» estime Patrick Drahi.
Ruée vers la fibre
Le confinement a servi de révélateur. Jamais les réseaux fibre n’ont été autant sollicités, tant pour télétravailler que pour le divertissement et l’éducation des enfants. Mais pour les opérateurs, la période était peu propice à la conquête d’abonnés. La priorité des Français confinés était plutôt de garder une connexion même un peu poussive plutôt que de changer d’opérateur, avec le risque de se retrouver seul face à une panne ou d’attendre sa nouvelle box pendant longtemps. Le marché s’est donc gelé. Mais il est vite reparti dès le déconfinement.
Les opérateurs n’ont d’ailleurs pas attendu longtemps avant de sortir de nouvelles box pour profiter à fond de ce mouvement. Début juillet, Free a lancé sa nouvelle box Pop. L’opérateur de Xavier Niel a frappé fort en proposant un forfait mobile à 10 euros par mois à vie à tous ses clients fixes actuels qui achèteraient le nouvel appareil. Quelques semaines plutôt, SFR et Bouygues avaient lancé de nouvelles offres fibre intégrant pour la première fois des téléviseurs Samsung.
La perte du roaming, une marge pure
Les opérateurs n’ont cependant pas été complètement immunisés contre le Covid. La fermeture de leurs boutiques pendant le confinement a fait plonger les ventes de smartphones. Les ventes d’équipements sont ainsi en baisse de presque 27 % chez Orange et autant chez SFR.
De la même façon, l’arrêt du tourisme international a amputé les revenus du « roaming », ces frais supplémentaires prélevés par les opérateurs lorsque leurs abonnés voyagent à l’étranger. Or ces revenus représentent de la marge pure. La crise a également fait baisser les investissements dans les réseaux, le nerf de la guerre dans cette industrie. Les dépenses dans les réseaux ont baissé de presque 10 % chez Orange. Les « capex » de SFR ont reculé de 18,7 % pour tomber à 460 millions d’euros.