La 5G est-elle incompatible avec l’aviation civile?

Revue de Presse

Source : lefigaro.fr (23 novembre 2020 )

Alors que la nouvelle génération de téléphonie mobile commence à être lancée en France, la question est posée par la Direction générale de l’aviation civile.

Selon un rapport américain, les fréquences 3,5 GHz pourraient brouiller les radioaltimètres des avions. AirFrance

Les opérateurs télécoms pourront-ils installer la 5G dans les aéroports? Cela fait un peu plus de deux semaines que la question taraude les états-majors des opérateurs télécoms. La direction générale de l’aviation civile a mis les pieds dans le plat. La DGAC s’appuie sur un rapport américain qui estime que les fréquences 3,5 GHz pourraient brouiller les radioaltimètres des avions. Embêtant quand sait que ces petits équipements servent à calculer la distance entre les avions et le sol.

« Je ne doute pas que le problème se règle assez vite», a déclaré Cédric O, secrétaire d’Etat à la transition numérique et aux télécoms. Il estime que pour les « 5% d’antennes» concernées, le retard de déploiement pourrait être de « quelques jours, quelques semaines».

« Il n’y a pas de souci spécifique dans la bande des 3,5 GHz», affirme de son côté l’Agence nationale des fréquences radio (ANFR), évoquant l’instruction d’un dossier « qui se passe normalement, avec des discussions». Au final, « beaucoup d’émoi pour pas grand-chose», tente de tempérer un proche du dossier. En effet, avant l’aviation civile, les services météo s’étaient alarmés dès l’année dernière de subir d’éventuels brouillages du fait de l’utilisation par les télécoms de ces fréquences. « Le problème a été résolu», affirme l’ANFR, serein quant à sa capacité à en faire de même pour le cas de l’aviation.

En effet, les Américains n’utilisent pas tout à fait les mêmes fréquences que les Européens pour leur 5G et leurs satellites, ce qui expliquerait des différences d’interprétations et de solutions à mettre en place. Dans le détail, les États-Unis, vont utiliser la bande des 3,7 GHz à 4 GHz, tandis qu’en France, les opérateurs se sont vus attribuer des licences dans la bande des 3,4 GHz à 3,8 GHz. Les radioaltimètres émettent, eux, dans entre 4,2 GHz et 4,4 Ghz. « Le problème, posé aux États-Unis, doit surtout trouver une solution aux États-Unis avant la mise aux enchères de la bande 3,7-4,0 GHz là-bas, plus proche de celle des radioaltimètres qu’en France», résume-t-on à l’ANFR.

La grogne des opérateurs télécoms

De leur côté, les opérateurs télécoms s’inquiètent d’avoir à subir les conséquences de cette nouvelle polémique. En effet, les aéroports sont des clients potentiels importants pour la 5G, qui doit notamment leur permettre de connecter plus d’objets. Cela concerne à la fois la mise en place de nouveaux services pour les voyageurs et d’autre part, des applications professionnelles de maintenance, de surveillance, de gestion des appareils… Une « verticale industrielle» importante, pour reprendre le jargon des opérateurs.

Ces derniers ont d’ailleurs réagi par le biais de leur fédération, la FFTélécoms, se disant « très attentifs aux questions de coexistence avec les équipements qui utilisent des fréquences proches de celles dont ils sont attributaires». Ils rappellent « que les systèmes mobiles et aéronautiques cohabitent de longue date, mais cette cohabitation repose sur des règles partagées et élaborées de manière consensuelle. Les contraintes techniques nouvelles qui pourraient peser sur l’exploitation des fréquences 3,5 GHz auraient dû être anticipées par les acteurs publics, notamment afin de disposer d’une approche harmonisée au niveau européen, et leur coût évalué, alors que les opérateurs ont dépensé près de 2,8 milliards d’euros dans les enchères de fréquences et que les services commencent à être lancés».