Les syndicats européens, en congrès à Paris, veulent durcir le ton.

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Source : information.tv5monde.com (29 septembre 2015)

La Confédération européenne des syndicats (CES) tient son 13e Congrès à partir de mardi à Paris sur fond de montée des nationalismes et de crise migratoire et entend durcir le ton contre l’austérité et pour les droits sociaux.

De mardi à vendredi, 509 délégués, de 90 organisations syndicales affiliées, représentant 39 pays européens dont les 28 de l’UE se retrouveront au palais de la Mutualité.

Le président français François Hollande, les présidents de la Commission européenne Jean-Claude Juncker et du Parlement européen Martin Schulz ouvriront la rencontre.

« Ce Congrès se tient dans un contexte de crise économique et de crise de l’emploi », a souligné Bernadette Ségol, secrétaire générale sortante. 23 millions de personnes sont au chômage dans l’Union européenne.

« La montée des inégalités entretient le dumping social, soit une concurrence pour la baisse des salaires et de la protection sociale », une situation « aggravée par les politiques d’austérité », a-t-elle dénoncé.

La question des réfugiés – « ces hommes, femmes et enfants qui fuient la guerre » – sera par ailleurs au coeur des débats du Congrès, a souligné Mme Ségol.

Le Congrès élira un nouveau secrétaire général : l’Italien Luca Visentini, 46 ans, est seul candidat en lice pour succéder à la Française, élue au précédent congrès en 2011.

Le futur leader de la CES a réclamé « une réforme du droit d’asile en Europe », s’en prenant vertement aux « pays qui refusent l’accueil des réfugiés de façon absolument inacceptable ».

Dans son « manifeste de Paris », qui doit être adopté, la CES revendique notamment un plan d’investissement en Europe, un « socle de normes sociales ambitieuses », un salaire minimum légal « se rapprochant des meilleures normes internationales ».

L’un des principaux griefs de la Confédération est le peu de poids accordé au dialogue social au niveau européen qui l’empêche d’obtenir des avancées.

Initié il y a trente ans par le Français Jacques Delors, alors président de la Commission européenne, en vue d’associer les partenaires sociaux aux décisions, « ce dialogue social est en panne et la Commission européenne ne joue pas le jeu », a dénoncé le leader de la confédération française CFDT, Laurent Berger.

M. Juncker « a promis un pilier européen des droits sociaux avec un rôle central pour les partenaires sociaux », a rappelé Mme Ségol qui en attend désormais la concrétisation.

– « Rôle tribunitien » –

Sur fond de crise, la CES s’est depuis son dernier Congrès radicalisée, portant le fer contre les politiques « d’austérité » en Europe.

En 2012, elle a condamné le traité budgétaire européen, un tournant pour une organisation légitimiste qui en 2005 était favorable au traité constitutionnel européen.

Elle a appelé à plusieurs reprises à des mobilisations contre l’austérité, qui n’ont pas toujours fait le plein.

Sa tâche n’est pas aisée : « il est compliqué pour la CES de trouver des positions communes compte tenu de la diversité de ses membres » aux intérêts parfois divergents, reconnaît un syndicaliste français. L’élargissement aux pays de l’Est a accru le fossé.

« La CES a des prétentions importantes mais ses membres n’encouragent pas les dispositifs qui nuiraient à leur pays », relève auprès de l’AFP Dominique Andolfatto, professeur de science politique à l’Université de Bourgogne.

« Elle conserve au minimum un rôle tribunitien, comme porte-voix du monde du travail face aux institutions et au patronat européen », selon cet analyste.

M. Visentini reconnaît les difficultés : « entre un salarié bulgare et un autre allemand, le salaire horaire, le temps de travail sont très divers », souligne-t-il, sans parler des différences de culture syndicale entre les pays du nord et du sud de l’Europe.

Il incombera à ce syndicaliste, écrivain et poète à ses heures, de définir des stratégies communes. Il dirigera la CES au cours des quatre prochaines années avec une équipe renouvelée.

Son choix n’a pas été simple : le puissant syndicat allemand DGB avait présenté un candidat qui n’a pas fait consensus et s’est retiré.