Ceux qui ont goûté au télétravail le plébiscitent, autant pour le gain de concentration que pour la contribution à une baisse de la pollution via la réduction de leurs déplacements. – Shutterstock
Evolutions technologiques, cadre légal assoupli, mutations managériales, nouvelles attentes des collaborateurs… Le télétravail progresse et les entreprises sont de plus en plus nombreuses à franchir le pas.
Moins de fatigue et de stress liés au transport, davantage de productivité, une meilleure répartition entre temps professionnel et temps personnel… L’enquête annuelle de l’Observatoire du télétravail (Obergo) met en lumière les bénéfices ressentis par les salariés ayant la possibilité de travailler à domicile. Conscientes de ces impacts positifs et encouragées par les ordonnances Macron, qui ont assoupli le régime juridique du télétravail, les entreprises sont plus nombreuses à franchir le pas, si bien qu’un quart des salariés français pratiquent cette nouvelle forme de travail. Qu’on ne s’y trompe pas, le télétravail n’est pas né avec la loi de septembre 2017…
Un accord ou une charte
« Preuve que les organisations s’intéressent à ce sujet depuis longtemps, un accord national interprofessionnel de 2005 posait déjà un cadre. Ce qui change, c’est que le télétravail est devenu un droit et qu’il est désormais envisagé de manière collective et non individuelle », explique Nawal Mrani Alaoui, responsable de l’activité stratégie sociale au sein de la division capital humain chez Deloitte. Dorénavant, un collaborateur peut demander à y avoir accès mais n’a un véritable droit que si son employeur s’est doté d’un accord ou d’une charte déterminant le cadre et les modalités du télétravail.
« Le texte ne prévoit pas que tous les salariés peuvent automatiquement y avoir recours, mais simplement que l’entreprise doit motiver son refus si elle n’accède pas à la demande de télétravail d’un collaborateur éligible à cette forme de travail en vertu de l’accord d’entreprise ou de la charte existant dans l’entreprise, ce qui suppose que ces outils aient été mis en place », précise Guillaume Bordier, avocat associé chez Capstan Avocats, rappelant que l’accord collectif concerne les entreprises dans lesquelles des organisations syndicales sont présentes. « Pour celles qui n’en ont pas, une charte sur le télétravail peut être établie unilatéralement par l’employeur après consultation du comité social et économique ou du comité d’entreprise, et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail », dit-il.
Nouvelles approches managériales
Avant l’assouplissement du cadre légal, le télétravail avait été favorisé par les innovations technologiques, les outils de communication et de collaboration facilitant le quotidien du travailleur nomade. « Grâce à un PC portable, une clef 4G, un hébergement des données sur le cloud et un scanner portatif, je suis opérationnel à distance. Seul impératif, pour sécuriser les systèmes et diffuser les bonnes pratiques auprès des salariés, j’ai embauché un responsable informatique », indique Laurent Bazin, dirigeant de la société d’expertise comptable Axis Experts Conseils.
Autre mutation ayant contribué au déploiement du télétravail, l’essor des nouvelles approches managériales. « La plupart des entreprises se sont emparées du sujet de la qualité de vie au travail. Pour ce faire, elles tendent à adopter davantage de flexibilité, observe Nawal Mrani Alaoui. Le management par le contrôle va laisser progressivement sa place au management par la confiance ». Reste que nombre de managers craignent un délitement du collectif, de l’esprit d’équipe et du sentiment d’appartenance à l’entreprise.
Amélioration et souplesse dans l’organisation
Pour conserver le lien, beaucoup se sont approprié les solutions audio et de visioconférence. Et les accords d’entreprise donnent un cadre où le télétravailleur peut piocher les règles en vigueur. « L’idée est de transmettre les fondamentaux d’une bonne hygiène de télétravail. Dans mon entreprise, il faut être joignable soit par e-mail, soit par téléphone, soit via la messagerie Slack. Et si le télétravailleur s’absente, il doit prévenir l’équipe », détaille Jérémy Lamri, fondateur de la start-up Monkey Tie.
Le télétravail semble plébiscité par tous ceux qui y ont goûté, pour des raisons aussi diverses que le gain de concentration et la contribution à une baisse de la pollution. Côté employeur, l’économie de mètres carrés est moins souvent évoquée que l’amélioration de la marque employeur. « Le télétravail est un élément clef dans la fidélisation. C’est la promesse d’un management plutôt moderne et d’une souplesse dans l’organisation », conclut Nawal Mrani Alaoui.
Source : lesechos.f12 septembre 2018)