Retour des grandes manœuvres dans le câble et les télécoms

Archives Les Brèves

Source : lesechos.fr (01 juin 2015)

Le deuxième opérateur mobile Vodafone pourrait fusionner avec le câblo-opérateur Liberty Media.Ce dernier vient d’annoncer le rachat de son concurrent américain Time Warner Cable.

Dans les télécoms, cela pourrait être le mariage de l’année. Déjà évoquée en fin d’année passée, l’hypothèse d’une alliance entre Vodafone et Liberty Global n’est plus taboue. Vendredi, certains des plus importants actionnaires de l’opérateur télécoms britannique se sont dits ouverts à un rapprochement avec le câblo-opérateur américain. John C. Malone lui-même, le patron de Liberty, avait estimé, il y a une dizaine de jours, que cela serait une «  formidable opportunité ». L’alliance du deuxième opérateur mobile mondial avec le roi du câble européen, qui pousse aussi ses pions aux Etats-Unis avec l’annonce du rachat de Time Warner Cable la semaine dernière, donnerait lieu à une mégafusion, l’une des plus importantes du secteur, ces dernières années.
Sur le papier, les deux actifs semblent faits l’un pour l’autre. Ils sont présents en commun dans sept pays dont le Royaume-Uni et l’Allemagne ou encore les Pays-Bas, dans lesquels ils pourraient être convergents. Au Royaume-Uni où BT est en train de racheter EE, Vodafone pourrait avoir accès aux 5 millions de clients dans le fixe de Virgin Media, racheté par Liberty l’an passé. Et, enfin, proposer des offres «  quadruple play » mêlant télévision, téléphonie fixe et mobile, et Internet. Pour Liberty Global, avoir Vodafone lui éviterait de lancer son propre opérateur mobile, lui qui est surtout présent dans le fixe.
Sur un marché des télécoms où la convergence est devenue la règle, le rapprochement de ces deux acteurs présente une logique industrielle imparable. D’un point de vue financier, la transaction permettrait, selon les calculs des analystes, de générer entre 20 et 25 milliards de dollars de synergies !
Des cultures différentes
Malgré la complémentarité des activités dans le fixe et le mobile, la constitution d’un tel géant en Europe serait évidemment scrutée de près par Bruxelles et la commissaire à la Concurrence, Margrethe Vestager. Certains actifs pourraient être cédés. En outre, ce mariage pourrait nécessiter la séparation de Vodafone de ses précieuses filiales dans les marchés émergents (Inde, Turquie, Afrique du Sud…), qui ont pourtant soutenu la croissance du groupe ces dernières années. De nombreux dirigeants au sein de Vodafone n’y seraient pas encore prêts.
La différence de culture financière entre les deux entreprises pourrait également être un frein  : Liberty Global s’endette pour financer son expansion à tout-va quand Vodafone rémunère généreusement ses actionnaires.
Reste à savoir lequel des deux mangerait l’autre. Si certains misent sur un rachat de Liberty par Vodafone, dont la capitalisation boursière (94,3 milliards d’euros) fait plus du double de celle du premier (44,1 milliards), le scénario inverse n’est pas exclu. «  Une société même plus petite avec une stratégie conquérante qui propose une offre publique d’échange avec prime, en théorie, ce n’est pas du tout inimaginable qu’elle en avale une plus grosse », fait valoir un dirigeant d’un opérateur télécoms français. L’expérience de John C. Malone en termes de fusion-acquisition n’est plus à démontrer.